Tribunes de Philosophes

"Dernières nouvelles de la nef des fous - Le ballet des catastrophes" par Manuel de Diéguez, un des plus grands philosophes contemporains.

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[Gravure : "la nef des fous" par Pieter ¨Van der Heyden]

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Au bal masqué des nations, les orages qui vont déchirer les dernières voilures et briser le grand mât de Clio annoncent le naufrage imminent de la nef des fous qu'on appelle l'histoire. Cinq étapes de cette ultime tempête illustreront la force des vents : l'effondrement des institutions de la Ve République, la débâcle du bon sens, la production artificiellement coûteuse de l'énergie électrique, la chute de la civilisation européenne dans les décombres de son ultime utopie, l'explosion du tonneau de poudre du capitalisme mondial et l'engloutissement des démocraties semi pensantes dans le gouffre du messianisme et de la sotériologie israéliens.

*

I - L'effondrement de la Ve République

A - Les capitaines au long cours et les caboteurs 
B - On cherche la charrue de Cincinnatus

II - La débâcle de la production d'électricité et " l'animal rationale "  

III - L'effondrement de l'Europe politique 

IV - L'explosion du capitalisme mondial
V - La démocratie de Tartuffe 

VI - Le naufrage de la conscience morale 

VII - Le débarquement de la pensée

*

I - L'effondrement de la Ve République

A - Les capitaines au long cours et les caboteurs

A l'instar de la IIIe République, la IV était décédée d'une maladie mentale connue depuis Périclès, celle de la chute des démocraties dans la cécité sans remède des classes dirigeantes triées à l'école d'un suffrage populaire sous-informé. Le champ de vision dont dispose ce type d'élite politique ne saurait dépasser l'horizon national. Aussi le Général de Gaulle et André Malraux avaient-ils vainement tenté de tracer la ligne de flottaison d'une République qu'ils rêvaient de rendre relativement pensante. Il suffisait, pensaient-ils, de confier le gouvernail de ce genre d'Etats à un capitaine habile à éviter les cabotages municipaux et le patrouillage au ras des côtes. Mais comment dénicher un explorateur des abîmes si le mode de sélection des pilotes exclut les choix pertinents? Comme on demandait au Général quel vide s'étendrait sous les yeux de tout le monde sitôt qu' il aurait quitté la barre, il avait répondu laconiquement que ce ne serait pas le vide, mais le trop-plein.

B - On cherche la charrue de Cincinnatus

Mais ce capitaine au long cours n'avait prévu ni la soudaineté de l'irruption dans la coque des flots déchaînés, ni la largeur de la brèche, ni le grouillement des vigies inexpertes qui envahiraient le pont. Effarée par le spectacle du désastre, la démocratie de village avait embarqué à bord une foule de conseillers municipaux plus dépassés par les évènements que jamais. Pendant un demi-siècle, la Ve République avait joué les Athènes de façade, mais le sceptre du pouvoir législatif censé représenter la souveraineté du peuple était tombé entre les mains d'un parti censé omniscient et qui avait progressivement réduit les députés au rang de spectres et de fantômes de la nation de 1789.

Les nains les plus ambitieux et les plus ardents à s'asseoir sur le trône d'une République des Pygmées ont bien vite compris qu'il leur suffisait de mettre dans leur poche les médiocres alliés du Président - c'est-à-dire la majorité d'un troupeau docile aux volontés du roi du moment - pour métamorphoser les élus en moutons de Panurge. L'Etat semi monarchique entraînait les bêlants à l'assaut de la démocratie elle-même, mais celle-ci n'était plus qu'une forteresse privée de vrais défenseurs.

Puis, de nombreux prétendants à la main de la Pénélope des modernes qu'on persévèrerait à appeler la démocratie ont occupé l'arène des chefs de clan florissants et des meneurs heureux. Mais ces Lilliputiens plantaient leurs banderilles dans l'échine d'un peuple proclamé souverain par convention de langage. Du coup la petite troupe des élus s'est divisée entre divers gangs de ferrailleurs et de maffieux dont chacun tentait de s'asseoir sur les coussins du carrosse qui le transporterait à la magistrature sommitale.

Quant les flibustiers ambitieux eurent commencé d'occuper les créneaux d'une Assemblée nationale réduite à faire feu à blanc sur ses propres membres, puis à tirer à balles réelles sur une France titubante, l'étripage démocratique auquel le Général de Gaulle avait tenté de porter un remède aussi olympien qu'inefficace est réapparu au grand jour d'une citoyenneté décérébrée; et il s'est bientôt révélé inutile de remplir de scalpels acérés la trousse des chirurgiens de la République - la marée déversait sur tous les rivages des masses de cadavres d'électeurs péris en haute mer. Alors les médicastres auxquels Hippocrate avait cru enseigner du moins les rudiments de la politique se sont amassés dans les cales bondées et autour des écoutilles.

Puis, quelques instants d'ensablement de Clio ont suffi à faire oublier la profondeur de l'abîme sur lequel flottait le navire. Mais comment d'une nation balancée par une trompeuse brise de mer ferait-elle surgir des flots une élite politique puissamment cuirassée? A l'heure où un peuple se trouve vent debout dans la tempête, comment imposer à tout le monde la carrure d'un chef d'Etat expert en ouragans? Et puis, comment mettre ensuite à la retraite le guerrier méritant? On cherchait en vain le Cincinnatus qui se laisserait docilement renvoyer à sa charrue après six mois seulement d'une dictature vertueuse. D'où la dissolution accélérée de l'Etat gaullien d'un côté et, de l'autre, la dislocation un peu plus lente de la démocratie parlementaire.

Deux cent soixante ans après la publication, en 1753, du Discours sur l'inégalité parmi les hommes, la question de la stature des chefs d'Etat quittait les rivages du bucolisme politique pour débarquer à nouveau frais dans l'histoire des tempêtes.

II - La débâcle de la production d'électricité et " l'animal rationale "  

En 2011, une épouvante planétaire avait pris la relève de celle de Tchernobyl trente ans auparavant: au Japon, l'atome corseté dans de gigantesques réacteurs avait brisé son enceinte d'acier et de béton et menaçait de désintégrer le globe terrestre. L'effroi était tel que le genre humain songeait à retourner à la production de l'électricité coûteuse d'autrefois, qui exigeait la mise sous pression de la vapeur d'eau dans d'immenses cuves alimentées au charbon, au pétrole, au gaz, aux marées, au vent ou à la chaleur des rayons du soleil.

Alors un enfant de quinze ans avait levé le doigt dans la classe et avait fait remarquer fermement à son instituteur que les locomotives d'autrefois n'étaient que des cocottes-minutes ambulantes et que l'énergie dégagée par la vapeur d'eau artificiellement emprisonnée et chauffée dans un habitacle d'acier était d'une puissance infiniment supérieure à celle que dégageait le charbon destiné à porter l'eau à ébullition. Il serait donc raisonnable, disait-il, de demander au réseau électrique existant ou à des générateurs alimentés par une fraction seulement de la puissance dégagée par la vapeur comprimée de produire du courant en circuit fermé. Bien plus, ajoutait-il, avec une assurance cartésienne, l'écart entre la puissance exploitable de la vapeur ligotée, d'un côté et, de l'autre, les calories dégagées par le gaz, le pétrole ou le charbon appelés à servir du combustible hors de prix, cet écart, disait-il, pouvait se trouver augmenté, puisqu'il suffisait de renforcer la résistance des parois des réservoirs à la fission pour porter la puissance d'expansion de la vapeur d'eau à la limite de compression à partir de laquelle l'eau cesse de bouillir.

Certes, l'énergie électrique produite ne s'élevait qu'à 30% de celle de l'ébullition de l'eau, alors que les locomotives du XIXe siècle transformaient l'intégralité de la pression de la vapeur en force mécanique et motrice. Mais ajoutait l'adolescent, si, de toute évidence, la puissance d'expansion dégagée par la vapeur confinée ressortit aussi peu à la physique de Joule que celle de la puissance de dilatation fantastique de l'eau gelée et si, par conséquent, l'énergie dégagée dépasse infiniment l'énergie consommée, un champ d'expérimentation nouveau s'ouvrait aux physiciens. Du reste, les Chinois amélioraient l'isolation des réservoirs et la rentabilité des turbines. Mais les grands groupes de pression industriels et politiques ont fermé les yeux et se sont bouché les oreilles, tellement leur souci n'était en rien de produire de l'électricité à bas prix et de protéger l'économie mondiale du coût exorbitant de la production de courant, mais seulement d'engranger d'immenses bénéfices.

On sait que, sitôt divulguée sur notre astéroïde, cette constatation a contribué au "lancement" de l'anthropologie critique de l'Ecole de Paris, qui démontrait en vain et depuis des années que l'humanité appelle intelligence le degré de déraison semi animale auquel elle a accédé ; et, depuis lors, les sciences humaines n'ont cessé de progresser en direction de la question centrale de savoir quels tests il fallait imaginer pour démontrer que les singes évolutifs sont demeurés des " animaux pseudo rationnels .

 III - L'effondrement de l'Europe politique 

La victoire à la Pyrrhus des lobes cérébraux moyens de l'époque avait gangrené les neurones du Vieux Continent, mais, comme il est dit plus haut, la carène ensablée avait permis à une science nouvelle, l'anthropologie critique de prendre son élan. On avait commencé d'observer que le propre des petits esprits est de se rendre plus vaporeux que les encéphales solidement construits, puis de grandir dans un air artificiellement raréfié, et enfin de s'auto-gigantifier dans un état d'apesanteur apparent. C'est ainsi que l'Europe supranationale des Bernardin de Saint Pierre de la démocratie mondiale s'est bien vite délitée en une exposition de moutons de bergerie; et comme la Grèce et la Suède, l'Italie et l'Allemagne, l'Espagne et la Finlande ne pouvaient ni marcher à l'unisson sous le soleil, ni partager le même ameublement cérébral, il s'est révélé impossible à Voltaire de rendre compatibles entre elles les boîtes osseuses des peuples agenouillés devant leurs autels respectifs et condamnés à demeurer inintelligibles les uns aux autres.

Il est bientôt apparu au grand jour que l'Europe demeurerait inapte à rassembler ses provinces et que la politologie officielle, donc superficielle qu'on enseignait encore sans l'étiquette d'une prétendue science dans les écoles et les universités ignorait tout de la psychobiologie qui fonde l'identité des peuples et des nations. On s'imaginait, par exemple, qu'une île pouvait débarquer sur un continent avec armes et bagages et partager le destin maritime inscrit dans ses gènes avec des nations arrimées de naissance à la terre ferme. Mais Jules César s'était bien vite enfui de l'Angleterre. Puis Agricola, le beau-père de Tacite, puis Claude, puis Domitien étaient allés chatouiller un instant les habitants de la Grande Bretagne à seule fin de s'assurer, au retour, les triomphes faciles d'une éloquence de harangueurs sur le forum.

Au XIe siècle, les troupes de Guillaume le Conquérant étaient devenues anglaises des pieds à la tête en moins de deux générations. Puis Charles Quint, Napoléon, Hitler s'étaient cassé les dents sur des indigènes construits sur un autre modèle. Sitôt que l'Europe avait vu l'eau entrer à flots dans sa coque éventrée, l'Angleterre avait rappelé une fois de plus à tout le monde qu'elle était une île et qu'elle entendait le rester, parce que les îles n'ont d'autre cervelle, complexion et musculature que celles dont la mer ceinture l'autonomie, l'isolement et la fierté.

Pourquoi ni les analyses pré-anthropologiques d'Hippolyte Taine, ni celles du comte de Keyserling n'ont-elles été prises au sérieux par une Europe vouée à la superficialité de ses sciences humaines, sinon parce que les démocraties se laissent désosser par l'abstrait qui leur avait donné leur essor.

IV - L'explosion du capitalisme mondial

Le diagnostic évangélisateur de Karl Marx était exact, mais le remède ressortissait à la rêverie parathéologique: depuis la construction dans les airs de la cité idéale de Platon, l'utopie politique illustrait la tournure d'esprit séraphique qu'empruntaient fatalement les trois principaux mythes de la délivrance et du salut attelés, depuis deux millénaires, à la tâche de hisser l'histoire dans les plus hautes régions de l'atmosphère. Mais, cette fois-ci, le désastre s'était inscrit dans la logique interne qui commande l'histoire angélisée de l'humanité.

Certes on s'était mis en devoir d'afficher toute la rigueur d'esprit dont témoignent les démonstrations de la géométrie d'Euclide. Mais il était évident, primo que si un machinisme d'automates étendait sa mécanique à la planète tout entière, secundo, que si l'expansion sans frein de la production sur ressorts des biens de consommation courante ne rencontrait plus d'entraves en raison de la rapidité des transports et de la suppression des frontières et des douanes, tertio, que si le coût du travail demeurait inégal d'un continent à l'autre, quarto, que si les uns entendaient exporter des marchandises à vil prix et les autres en produire d'invendables par définition, on verrait le chômage ronger de l'intérieur l'économie des pays riches et les conduire à un effondrement accéléré.

Alors, les industriels, ces rapaces que Balzac appelait des loups cerviers, n'hésiteraient pas à rentabiliser leur production à l'école des Tamerlan du monde moderne; et ils vous transporteraient en toute hâte leur outillage tant mécanique qu'humain vers les contrées lointaines et grandes ouvertes à leur avidité. Alors, la pauvreté prendrait un visage nouveau sur toute la mappemonde, puisque le globe terrestre se rendrait plus acéphale que jamais pour la seule gloire des empires en ascension d'un côté et pour la seule débâcle des Crésus de l'autre; et la misère ravagerait les économies coûteuses au profit des terres où suaient des esclaves.

Jamais la logique des géomètres n'avait connu de si beaux syllogismes sur les planches d'un théâtre aussi vaste, jamais des raisonnements plus impeccables n'avaient rencontré des abscisses et des ordonnées plus sûres de la trajectoire de leur dialectique sur tout le globe terrestre.

V - La démocratie de Tartuffe 

Le glaive forge-t-il la loi sur l'enclume de l'histoire ou la loi fait-elle plier l'acier des épées? Pour l'apprendre, observons la cinquième catastrophe qui a englouti la nef des fous de l'époque et qui est résultée de la conservation dans le formol des idéalités de la démocratie. Jusqu'alors, les guerriers changeaient leurs conquêtes en fleurons de la mémoire du monde, tandis que les vaincus moisissaient dans la honte de leur gloire perdue. Mais à la suite des carnages planétaires de 1914 à 1918, puis de 1940 à 1945, les Etats-Unis avaient pris, dans le monde entier, la tête des démocraties artificielles et assuré la domination du sceptre planétaire de la liberté; et l'on avait vu le droit international quitter sa condition piteuse de bagnard de l'histoire universelle pour brandir le mythe de la légitimité de sa tiare au seul profit d'un empire étranger.

Du coup, l'histoire de la planète s'était soudainement chapeautée du diadème de la loi et de la morale censés guider un astéroïde réputé au service d'une justice universelle. Mais, dans le même temps, il aurait fallu préciser le statut d'un peuple flottant dans le néant, alors que la population palestinienne demeurait privée d' Etat, parce qu'Israël n'avait pas seulement fait main basse sur ses terres, mais ficelé et bâillonné l'Amérique tout entière; et le géant d'outre-Atlantique s'était trouvé scindé entre deux songes de l'humanité incompatibles entre eux, celui du Gulliver garroté de la démocratie et celui d'un empire armé jusqu'aux dents. Comment feindre de combattre la colonisation sur toute la terre et, dans le même temps, légitimer les conquêtes d'Israël au Moyen Orient? La démocratie mondiale avait enfanté son pendant: un Tartuffe planétaire lui servait de sosie

 VI - Le naufrage de la conscience morale 

Néanmoins, le 29 novembre 2012, le malheureux peuple nazaréen porté par la civilisation de la Liberté, de la Justice et du Droit sur un brancard avait été déposé tout saignant dans l'enceinte de l'Assemblée des Nations Unies, afin qu'un mode de conservation dans l'alcool fût réservé à l'agonisant: le mourant sur sa civière serait expressément qualifié d'Etat réel, lui disait-on, mais son acte de baptême ne figurerait pas sur le registre des Etats vivants et respirants, le demi-trépassé serait proclamé un Etat souverain, lui disait-on, mais on l'éborgnerait au préalable, il serait pleinement reconnu pour un Etat en droit international, lui disait-on, mais l'oeil qu'on lui laisserait demeurerait mi-clos, on le saluerait comme un Etat en chair et en os, lui disait-on, mais on légitimerait son occupation par des troupes étrangères en rangs de plus en plus serrés, il serait libre, lui disait-on, mais on le laisserait crier dans le désert.

Du coup, la coque du navire qui, depuis 1945 était censé fonder l'ordre mondial sur le triomphe d'une conscience morale bénie par le ciel et d'un droit international environné de fauves rugissants, donc sur une victoire colossale du Beau, du Juste et du Bien sur les animaux sauvages, a subi une éventration plus béante que les précédentes; et l'Eden des barbares de la Démocratie a vogué avec une brèche si grande ouverte dans sa carène que le paradis juridico-politique qui avait paru s'installer un instant sur l'astre des carnassiers a commencé d'engloutir sous les flots le Titan de 1945 et de délégitimer son jardin des Hespérides sur toute la terre habitée.

- Obama assis entre deux selles - La raison prophétique et la raison pratique , 13 avril 2013

Certes, on avait vu les diplomates de cent trente huit Etats sur cent quatre-vingt treize tomber dans les bras les uns des autres à l' annonce que la Palestine avait été retirée du tombeau et conviée à entrer dans son éternité; mais à quoi bon conquérir la demi-légitimation d'une nation qu'on maintiendrait en bas âge, comment passer d'une croissance difficile à la maturité?

VII - Le débarquement de la pensée

Alors, une fois de plus, l'histoire de la raison du monde a connu un bouleversement copernicien de la problématique qui régnait jusqu'alors sur les ressorts et les rouages des fuyards de la nuit animale; car si l'Algérie, la Tunisie, le Liban, le Cambodge ou le Vietnam français, ou bien l'Egypte et l'Inde anglaises, ou bien le Panama américain n'avaient pas connu de quarantaine au purgatoire des peuples privés de souveraineté - s'ils avaient passé sans embûches du rang de colonies, d'ethnies et de tribus muettes à celui de nations - quel statut fallait-il attribuer aux condamnés à passer par un sas, celui des candidats bloqués durablement dans une auberge à mi-chemin entre leur mutisme et la place pharaonique que le droit leur reconnaît sur la scène internationale?

C'était la question de la légitimité des droits politiques du genre humain lui-même et sur toute la terre que soulevait la léthargie locale d'un droit international frappé de paralysie au Moyen-Orient. Car Israël entendait maintenant recouvrer les terres d'où les Pompée, les Vespasien et les Titus avaient fini par les chasser par la force des armes, il y avait deux millénaires de cela, parce que leurs ancêtres avaient refusé aussi bien de payer le tribut que les autres peuples vaincus payaient rubis sur l'ongle à l'occupant romain que d'adorer les statues de bois , de pierre ou de fer des dieux du vainqueur dans leur temple - ils prétendaient que leur Zeus à eux, un certain Jahvé, avait perdu bras et jambes en cours de route, mais nullement aux fins de se vaporiser dans l'impuissance des décorporés, mais, tout au contraire, afin de rendre redoutable une musculature invisible. L'Ancien Testament était devenu l'anneau de Gygès d'un chef de tribu et d'un roi de la guerre enfin soustraits à tous les regards.

Mais si les hommes scellent avec des cailloux, des végétaux, des animaux et des statues des alliances à la fois charnelles et insaisissables, il fallait changer non seulement le tableau de bord du sacré, mais tout l'échiquier de l'imaginaire dans l'histoire, afin de doter la politologie mondiale de l'ossature anthropologique d'une connaissance abyssale des ressorts psychophysiques de notre espèce; et il devenait cruellement évident, primo, que les rescapés des ténèbres sont des plantes appelées à plonger leurs racines à une grande profondeur dans le sol et, secundo, que jamais la civilisation musulmane, vieille de quatorze siècles, n'acceptera qu'un peuple d'Allah fût réduit à une horde errante et seulement de passage.

Du coup, c'était le retard proprement scientifique de la géopolitique moderne qui devenait la cinquième catastrophe dont j'ai rappelé la valse: il fallait faire progresser la connaissance des rouages d'une espèce de détoisonnés rebelles à l'examen des arcanes visibles et invisibles de leur séjour sur la terre. Pour la première fois, la politologie mondiale avait pris rendez-vous avec une histoire de l'intelligence. (La Bibliothèque nationale annonce la numérisation par ses soins, de mon Une Histoire de l'intelligence, Fayard 1986 et de quelques autres.)

C'est alors seulement qu'une géopolitique bâtie sur une anthropologie vaillante, donc enfin bâtie sur une connaissance rationnelle de la spécificité cérébrale des semi-évadés de la zoologie a pu faire ses premiers pas sous l'os frontal de la civilisation européenne. Mais pour seulement tenter de s'engager sur ce territoire jamais défriché, il fallait unifier au préalable les scissions encéphaliques énumérées ci-dessus.

Ce que je tenterai d'expliciter le 27 avril.

Le 20 avril 2013

Visiter le site officiel du philosophe Manuel de Diéguez

Commentaires

de Anne-Marie
Pour une redécouverte véritables de ce qui fonde nos identités respectives…
"Il est bientôt apparu au grand jour que l'Europe demeurerait inapte à rassembler ses provinces et que la politologie officielle, donc superficielle qu'on enseignait encore sans l'étiquette d'une prétendue science dans les écoles et les universités ignorait tout de la psychobiologie qui fonde l'identité des peuples et des nations."
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12 May - 18h00

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