« La dimension eschatologique du jihad en Syrie et en Irak » par Frédéric PICHON, Chercheur associé à l'Equipe Monde Arabe Méditerranée de l'Université François Rabelais (Tours)
Frédéric PICHON est diplômé d'arabe et docteur en Histoire contemporaine. Ancien élève de l'IEP de Paris, il a vécu à Beyrouth et séjourne régulièrement au Proche-Orient depuis 2002, en particulier en Syrie. Il enseigne la Géopolitique en classes préparatoires. Auteur d'une thèse sur la Syrie, il est chercheur associé à l'Equipe Monde Arabe Méditerranée de l'Université François Rabelais (Tours).
Les succès foudroyants de l'Etat Islamique en Irak et en Syrie interrogent sur la capacité américaine à stabiliser la région et va sans doute remettre en cause leur politique d’alliance régionale basée sur les puissances sunnites du Golfe. La zone grise en voie de constitution le long de la vallée de l’Euphrate est lourde de menaces pour la région comme pour l’Europe. Mais au-delà des considérations stratégiques, militaires et politiques de cet événement, il est nécessaire d’en mesurer la dimension psychologique, en l’espèce religieuse, qui renvoie à l’eschatologie musulmane et à une volonté de régénération de l’Islam. En effet, la proclamation d’Al Baghdadi comme Calife apparaît comme désuète, mais constitue en fait une formidable bouffée d’utopie d’autant que les terres convoitées par ce proto-Etat ont une résonnance eschatologique certaine. Cette dimension a un effet d’entraînement certain sur les populations musulmanes sunnites locales ou venues de l’étranger : pour ces dernières, elles sont le moyen d’une forme de « régénération » par les lieux. La géographie joue un rôle majeur : il n’est que de consulter la littérature djihadiste pour constater combien notamment la référence au « Shâm », à l’ « Iraq » sont prépondérantes : elles furent celles précisément des premiers déchirements de l’Islam (Hussein, fils d’Ali fut vaincu et tué à Kerbala) et seront celles du combat final contre Shaytan à la fin des temps (Damas ou Shâm).
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