"Le rapport Védrine et l'adolescence de la raison (2)"par Manuel de Diéguez, un des plus grands philosophes contemporains.
Avertissement
Au cours de mon analyse précédente de l'évaluation de la politique étrangère de la France que M. Hubert Védrine a rédigée à la demande du Président de la République, j'avais fait quelques pas dans les souterrains de notre diplomatie et j'avais observé divers champignons de la servitude, dont la dispersion sur le sol de la caverne ne conduisait nulle part les pas hésitants du spéléologue. Mais maintenant, un champignon immense se dresse devant vous, celui d'une scolastique dont le venin empoisonne depuis des siècles l'encéphale des évadés titubants de la zoologie.
Or, dans les dernières pages de son rapport, M. Védrine semble avoir rencontré cette plante hallucinogène. Le récit de son dialogue avec ce puissant personnage achèvera de vous instruire du regard que vous devrez apprendre à porter sur l'encéphale de l'histoire et de la politique.
Car l'humanité ne se trouve en état de veille qu'entre deux sommeils, celui de l'enfance et celui de l'âge où de puissants narcotiques lui permettent de dormir jusqu'à ce que mort s'ensuive. Entre ces deux assoupissements, votre adolescence vous offre quelques années d'un éveil cérébral précaire. Alors votre cheminement vous fait escalader à petits pas le champignon de la scolastique. Mais cet Himalaya bouche l'horizon, cet Himalaya vous interdit de porter un vrai regard sur votre propre espèce, cet Himalaya sécrète le poison universel de la sophistique, cet Himalaya fait prendre à notre espèce une chose pour une autre, les "idées pures" pour la parole du ciel. Puis, le pain et le vin de chaque jour ont passé, aux yeux de vos ancêtres, pour la chair et le sang d'une divinité et longtemps, l'auteur de votre extermination sous les eaux a passé pour votre bénisseur, longtemps, les tortures éternelles qu'il vous infligeait sous la terre ont alimenté vos prières. Et maintenant, votre sauveur et votre délivreur dressent leurs garnisons sur vos terres ; et l'apocalypse mécanique qu'ils laissent se rouiller entre vos mains, vous la prenez pour l'instrument de votre liberté.
*
1 - Retour à notre public d'adolescents
2 - La vassalisation démocratique
3 - La réflexion anthropologique sur les dévotions domesticatrices
4 - L'évolution du cerveau des démocraties
5 - Un apôtre bien corseté
6 - Penser le nucléaire militaire
7 - Un " bibelot d'inanité sonore " (Mallarmé)
8 - Votre avance cérébrale sur votre siècle
9 - Un génocide raté
10 - La raison et le "Connais-toi
11 - Le nucléaire et la politique du fantastique
12 - La signification anthropologique de la scolastique
13 - L'avenir de l'Europe de l'intelligence
*
1 - Retour à notre public d'adolescents
L'adolescence se trouve donc conviée, disais-je (- Le rapport Védrine et l'adolescence de la raison (1), 15 décembre 2012) à lire l'histoire contemporaine avec des bésicles d'anthropologues et de logiciens, donc de peseurs d'une raison bancalisée à l'œil nu. A l'aide de quelles lunettes décoderez-vous le passage suivant, censé relater l'"échec" de la tentative du retour de M. Chirac dans l'OTAN, s'il s'agit d'apprendre, au préalable, à évaluer le ramassis des encéphales aveuglés par les vanités de l'auto-vassalisation? M. Védrine explicite deux raisons principales de l'avortement de la manœuvre cousue de fil blanc de la diplomatie française en 1995: "L'échec de la mise en place d'un système de double chaîne de commandement à l'intérieur de l'OTAN (qui aurait théoriquement permis à l'adjoint du SACEUR [à la France] d'activer [seule] la chaîne de commandement européenne si les États-Unis décidaient de ne pas intervenir " et ensuite " le refus américain d'octroyer à la France le commandement Sud [installé] à Naples [et qui sert de] base à la VIème flotte américaine)."
Il faut savoir que, depuis 1945, ce port - rattaché à l'Italie en 327 avant notre ère - se trouve purement et simplement annexé au territoire américain sous le couvert d'une fiction juridico-diplomatique nullement déshonorante en soi: les ambassades bénéficient dans le monde entier d'un statut flatteur et qui les soustrait à la souveraineté de l'Etat sur le territoire duquel la géographie les a placés. Mais vous devez comprendre, les enfants, que toute la péninsule est devenue une gigantesque ambassade déguisée en porte-avion du Nouveau Monde et amarrée au cœur de la Méditerranée. Sans une exterritorialité artificiellement étendue au bénéfice de l'occupant, la ruée des divisions de service vers l'Irak en 2003 aurait été empêchée par Rome et par Berlin: toutes ont transité par Pise, Florence et Bologne en provenance de la gigantesque base stratégique - pardon, ambassade américaine - de Ramstein en Allemagne, dont le même modèle sera implanté en Irak - mais ce sera la plus titanesque "délégation" du mythe démocratique dans le monde.
2 - La vassalisation démocratique
La question est donc, pour vous, de savoir si, oui ou non, le rapport de M. Védrine évalue, même indirectement, le poids de la souveraineté de fait que l'Empire d'outre-Atlantique exerce sur une Europe domestiquée depuis 1949 sous le drapeau d'une Liberté vassalisante. Une évaluation de cette occupation rédigée sur demande à un ancien ministre des affaires étrangères de la France, donc validée, en principe, par le génie diplomatique des Richelieu ou des Talleyrand, peut-elle soupeser publiquement les effets des retrouvailles de la France avec le joug militaire de l'OTAN si cette servitude se réclame aussi officiellement qu'autrefois de l'ubiquité et de l'universalité des valeurs séraphiques de la démocratie? Mais, en réalité, l'Elysée a demandé à ce diplomate de légitimer de sa main et au nom des fondements mêmes des Républiques - et pourtant, le plus discrètement et le plus habilement qu'il se pourra - la connivence officieuse de la France post-gaulliste avec la vassalisation continue et feutrée du Vieux Continent à laquelle les Etats-Unis procèdent avec succès depuis soixante treize ans.
M. Védrine aurait pu refuser tout net une mission qualifiée "d'informative", mais qui demandait à son autorité professionnelle de passer sous un silence précautionneux l'évidence qu'en droit diplomatique, les gouvernements italiens, allemands, espagnols, belges, japonais et d'autres sont illégitimes par nature et passibles d'une condamnation pour haute trahison dans le cas où une maturation de l'esprit public et une meilleure information des citoyens conduiraient un suffrage universel jamais consulté sur l'essentiel à un verdict sévère des patries à leur égard. Mais la lettre et l'esprit du droit international public actuellement censé légitimer une occupation qualifiée de "libératrice" par antiphrase se trouveront un jour invalidés.
L'anthropologie politique, elle, obéit à l'éthique de la pensée logique, donc à la rigueur du raisonnement. A ce titre, elle scrute les processus psychogénétiques irrationnels par définition qui conduisent insensiblement une Europe libérée depuis un quart de siècle de toute menace militaire à une auto- domestication évangélisante, donc subjectivement tenue pour apostolique, mais sur le modèle d'une félonie parée d' un vêtement messianique asservissant. Vous devez donc introduire votre connaissance anthropologique des mentalités magiques dans votre science politique.
3 - La réflexion anthropologique sur les dévotions domesticatrices
Washington dispose de deux cents places-fortes du mythe de la Liberté en Allemagne et de cent trente sept garnisons sotériologiques en Italie, où elles demeurent, de surcroît, en expansion rédemptrice continue et intensive, donc sans que la chute du mur de Berlin en 1989 ait mis un terme à leur eschatologie, bien au contraire. La France peut-elle, dans un rapport officiel, ne rien dire de l'occupation militaire de type démocratico-doctrinal que subissent les deux grands vaincus européens de la dernière guerre? Comment se fait-il que, soixante-huit ans après la fin de la seconde guerre mondiale, Rome et Berlin demeurent soumis au même statut de vaincus idéologiques à perpétuité que le Japon et pourquoi tous trois y mettent-ils un empressement parareligieux dont la forte odeur de conversion monte maintenant des autels de la démocratie?
Telle est l'optique proprement anthropologique dans laquelle il vous appartient de vous poser avec le sérieux de la jeunesse intelligente de votre temps la question décisive de la signification pieuse d'un retour de la France laïque à l'orthodoxie régnante, alors que sa docilité catéchétique apparente échappe à l'essentiel de la vassalité confessionnelle dont elle s'est délivrée en 1966, à savoir le quadrillage de son territoire par la force d'un glaive convertisseur. Sachez que, dès le 17 sept. 1958, donc antérieurement à la chute de la IVe République, le Général de Gaulle, alors Président du Conseil aux côtés des Guy Mollet et des Pinay, avait senti le fagot: il avait osé demander au Saint Siège de la démocratie que la direction, tant politique que militaire de l'Alliance appartînt exclusivement au trio des Etats-Unis, de la Grande Bretagne et de la France. Car, en 1961, déjà comme M. Védrine le souligne sans fard, non seulement les modes de "décision et de subordination" - c'est moi qui souligne - des prétendus "alliés" au sein d'une "alliance" de vassaux n'avaient changé en rien de fumet; le "commandement en chef" des forces de l'OTAN "a même interdiction de révéler aux autorités nationales, et donc au Président français, sur quelles bases sur leur propre territoire sont entreposées les armes nucléaires de l'Alliance." [Le soulignement sera toujours de mon fait]
M. Védrine peut-il évaluer une vassalité en diplomate averti si la dimension hérétique du Général de Gaulle échappe à une science du politique encore privée d'un regard d'anthropologue de la servitude? Dans sa préface de la traduction française des Mémoires de Mme Madeleine Albright, ex-secrétaire d'Etat de 1997 à 2001 (Dieu, l'Amérique et le monde, éd. Salvator, 2008), M. Védrine rejette, mais seulement d'un revers de la main, la vision auto-apologétique de l'avenir du monde de cette prêtresse. Mais si Talleyrand n'avait pas connu en évêque les ressorts anthropologiques du mythe chrétien, il n'aurait pas triomphé de la Sainte Alliance au congrès de Vienne en 1815.
4 - L'évolution du cerveau des démocraties
L'heure de votre entrée dans les périls de l'âge pythique de la démocratie mondiale approche à grands pas. Dès qu'elle aura sonné au beffroi de votre citoyenneté d'hérétiques de l'Europe des serfs, vous devrez vous poser la question du danger de mort que courent des Républiques mal informées et placées sans le savoir sous le joug militaro-religieux de l'étranger - et cela en application d'une disposition pseudo légitimante de leur constitution naïvement laïque. Mais comment cette interrogation à la fois patriotique et théologique vous fournira-t-elle également les instruments intellectuels de votre compréhension anthropologique des ressorts "sacrés" de la conquête de la Cisjordanie par Israël si la France rationaliste n'a pas de connaissance rationnelle des mythes religieux, et d'abord du christianisme? Car, sous les apprêts et les falbalas des usages diplomatiques les plus cartésiens d'apparence, sachez que la subordination effective de l'Italie et de l'Allemagne à Washington se trouve étroitement liée à une occupation de type calviniste de ces deux nations et que les troupes du Nouveau Monde sont aussi messianisées en sous-main par le glaive du salut démocratique qu'Israël par son eschatologie biblique.
Votre évaluation de la portée mythique, donc subrepticement religieuse du retour pourtant tout nominal en apparence d'une France ignorante sous la tutelle d' un OTAN sotériologisé n'aura donc de sens et de portée scientifiques que si vous vous posez en anthropologue du sacré la question du statut réel ou formel des nations actuellement qualifiées de souveraines, mais viscéralement branchées sur un ciel étranger. Certes, la France officielle ne se trouve soumise que verbalement à un OTAN messianisé, puisqu'elle n'est plus occupée physiquement par les fidèles d'une religion, tandis que l'Italie, l'Allemagne et le Japon sont placés à demeure et en temps de paix sous le commandement réputé salvifique et rédempteur des croyants incrustés sur leur sol. Mais dès lors que les bases militaires américaines ne sont pas revenues piétiner le territoire national, quelle est la portée actuelle du rappel de M. Védrine qu'en 1966, "le quartier général de l'OTAN est transféré de Roquencourt près de Versailles à Evere près de Bruxelles", si le quartier général de Rocquencourt était celui du "salut" que dispensait l'orthodoxie doctrinale de la démocratie mondiale? Dès lors que le scannage de l'encéphale humain ne fait pas encore partie intégrante de la politologie scientifique, comment connaîtrions-nous les effets sur le terrain d'un déplacement du quartier général d'une théologie?
5 - Un apôtre bien corseté
Vous remarquerez, les enfants, que, même aux endroits où elle se veut franche du collier et directe dans son expression, l'évaluation de M. Védrine n'est jamais agressive qu'en aval, donc en retrait d'une pesée anthropologique et critique de la révolution parareligieuse dont se nourrit la Liberté américaine. Or, celle-ci se trouve mythifiée par le calvinisme depuis les origines. Dans ces conditions, comment se fait-il que l'analyse de l'élève de François Mitterrand soulève page après page et même paragraphe par paragraphe les pistes diplomatiques libératrices censées s'ouvrir avec insistance à la France? Car, dans l'esprit de M. Védrine, il s'agit de bout en bout d'armer résolument une Europe pourtant appelée, dans le même temps, à demeurer définitivement corsetée par l'OTAN.
Supposons qu'il faille dévassaliser crûment l'Angleterre, alors qu'on ne dispose pas d'une science de la vassalité: "Avec la Grande Bretagne, cela signifie [qu'il faut] lui demander jusqu'où elle est prête à aller avec nous dans le cadre du Traité de Lancaster House, si elle prendra des décisions budgétaires cohérentes avec ce Traité, à quels autres partenaires européens elle est prête à ouvrir certains aspects de ce Traité et si elle accepte que soit créé un vrai centre européen d'analyse, de réflexion et de prévision stratégique."
Supposons ensuite qu'une ambition non moins vaillante et non moins ignorante conduise une France scientifiquement en retard sur son siècle, mais "décomplexée", à dévassaliser à son tour l'Allemagne culinaire de Mme Merkel: "Avec l'Allemagne, cela signifie [qu'il faut] lui demander si le renforcement politique de l'Europe, qu'elle appelle de ses voeux, ne devrait pas se traduire par plus de décisions concrètes en matière d'industrie de défense et par plus d'engagements en matière d'opérations européennes extérieures et par une concertation franco-allemande sur les questions traitées au sein de l'Alliance." Mais comment conduire le char d'une nation attelée de cette façon dans le cirque de l'histoire? Tous les cavaliers savent qu'on ne monte pas un cheval avec des rênes inégalement tendues. Et il ne s'agit pas seulement de rênes: l'Europe porte deux harnais de la politique, celui du Moyen Age et celui de la nouvelle Renaissance au large de laquelle elle court à bride abattue.
6 - Penser le nucléaire militaire
Pour l'heure, des mécanismes pédagogiques liés à une éducation politique théologisée dès le plus jeune âge s'opposent à la percée d'une élite trans-ecclésiale et trans-idéologique; et toute l'élite dirigeante de la planète demeure parquée dans l'enceinte d'une civilisation théologisée en sous-main - et cela de telle sorte que la sélection tardive et toujours en aval des élites tant politiques que cérébrales exclut aussi subrepticement qu'efficacement la promotion des esprits porteurs d'un regard de l'extérieur sur le mythe "rédempteur" de la "Liberté". C'est redire que ces questions de fond demeureront sans réponse aussi longtemps que les paramètres anthropologiques qui régissent l'histoire d'un monde messianisé dès les bancs de l'école par la sotériologie politique américaine n'auront pas permis une percée intellectuelle en amont.
Quant à l' Eglise, on sait qu'elle hait viscéralement l'individualisme cérébral, qu'elle le juge luciférien par nature et que si vous ne chantez pas dans le chœur, vous serez fatalement ostracisé. Mais toutes les sociétés sont fondées sur le rejet instinctif de l'indépendance d'esprit - ce n'est jamais qu'une question de degré. Aussi personne n'ose-t-il soulever la question - tenue pour incivique, hétérodoxe et démoniaque - de l'absence de crédibilité stratégique de "l'arme nucléaire", c'est-à-dire le problème de l'impossibilité proprement militaire, pour le simianthrope devenu du moins semi-rationnel, de se faire sauter aussi patriotiquement que stupidement la cervelle. Et pourtant, dans l'inconscient politique de notre espèce, la dissuasion atomique se trouve fidèlement construite sur le modèle de l'apocalypse biblique. Pourquoi ni la France dont le bistouri laïc s'est émoussé, ni l'Allemagne des piétés philosophiques des descendants de Kant et de Hegel ne se posent-elles la question du statut présupposé "militaire" d'une arme inutilement héroïsée par sa folie, sinon parce qu'il serait voltairien en diable d'user du scalpel de l'ironie socratique en politique.
"Force est de constater que la divergence entre la France et l'Allemagne sur la dissuasion nucléaire - et sur le nucléaire en soi - reste très actuelle, que l'Allemagne privilégie le cadre de l'OTAN (l'Allemagne reste un des plus gros contributeurs au budget de l'OTAN et ses forces conventionnelles sont très importantes) pour la conduite d'éventuelles opérations militaires et que Berlin a donné, pour diverses raisons, un coup d'arrêt brutal au projet EADS/BAE (Nationalisme industriel? Contexte 2012 -2013? Autre ?). Cependant, même si les ministres français et allemand de la Défense avaient signé, le 4 juin 2012, une lettre d'intention pour promouvoir une coopération capacitaire, la question demeure: Y a-t-il à Berlin une vraie volonté d'agir, en matière de défense, en européen, et en franco-allemand?"
7 - Un " bibelot d'inanité sonore " (Mallarmé)
Mais la France du Quai d'Orsay ne saurait faire progresser le débat sur la mythologie nucléaire si elle demeure campée sur le terrain d'une réflexion pré-anthropologique et si la pesée politique et stratégique de la crédibilité de l'atome guerrier se trouve dans le même état d'apesanteur que la pensée théologique du Moyen Age, qui n'osait se poser la question de la fiabilité philologique d'une apocalypse alors faussement attribuée à Saint Jean. "Le Président Hollande a rappelé au Sommet de l'OTAN à Chicago les principes auxquels la France reste attachée en matière de défense antimissile balistique: le caractère complémentaire, et non substituable, de la défense antimissile à la dissuasion nucléaire, l'adaptation du système à la menace, le contrôle politique par les Alliés, la maîtrise des coûts, la nécessité de préserver la BITDE (base industrielle et technologique de défense européenne); et enfin la coopération avec la Russie."
On sait que les Etats-Unis tentent de renforcer leur présence politique, idéologique et militaire en Europe par la substitution d'un bouclier anti-missile classique au mythe atomique français. Une saine politique de la souveraineté répondrait sèchement que la Russie ne représente aucun danger militaire pour l'Europe et que si une telle menace se dessinait dans un lointain avenir, il n'appartiendrait qu'à nous de nous armer, parce que les Etats-Unis ne sont pas les secouristes hors de prix des autres nations de la terre. Mais si vous demandez au dieu Atome d'assurer votre salut à votre place, vous mettrez la charrue avant les bœufs et vous vous enfermez dans une diplomatie sottement ambitieuse de ridiculiser la logique politique qui régit le monde réel.
Car vous vous contraindrez, à l'aide de cent artifices, à magnifier la capacité cérébrale pourtant fort réduite d'un animal censé bénéficier, du moins depuis le paléolithique supérieur, d'une évolution lente, mais sûre du volume de sa boîte osseuse; et vous ne verrez pas que la faiblesse native dans laquelle la raison simiohumaine est actuellement demeurée résulte nécessairement - comme il est rappelé plus haut - d'une carence interne à la logique moyenne de notre temps, dont l'étiage est demeuré semi-animal, donc inscrit d'avance dans une incohérence intellectuelle enracinée au cœur des raisonnements élémentaires d'aujourd'hui.
Vous trouverez une illustration exemplaire de ce point dans l'évaluation de M. Védrine: ou bien la dissuasion aura fonctionné à ravir, si je puis dire, et l'on ne voit ni comment, ni pourquoi elle devrait se trouver, de surcroît, dûment confirmée au canon, ni qu'il soit néanmoins indispensable de se lécher les babines de satisfaction après coup et à titre soi-disant "complémentaire", puisque la guerre n'aura pas eu lieu, du fait qu'elle se sera révélée hors de la portée des pattes d'une bête mythologisée de naissance. Et si, par un prodige incroyable de Zeus, de Jahvé, d'Allah ou d'Osiris, la pulvérisation auto punitive d'une planète placée depuis belle lurette au-dessus de la rôtissoire des châtiments éternels s'est produite au grand jour du nucléaire enfin victorieux, l'on ne voit pas non plus comment " compléter " à merveille un monde expédié tout bouillonnant dans le post-apocalyptique et le méta- vaporisé.
Vous devez donc vous persuader, les enfants, que le cerveau de l'humanité post-darwinienne à laquelle vous appartenez n'est pas encore devenu intensément cogitant et que, pour l'instant, c'est spectaculairement et à l'échelle de l'astéroïde sur lequel il trottine que cet animal déraisonne sur le modèle de la sécrétion verbale de "bibelots d'inanité sonore", comme disait le poète.
8 - Votre avance cérébrale sur votre siècle
Il faudra donc que vous tentiez de faire débarquer dans les neurones de vos congénères une question anthropologique primordiale sur la nature et les fondement des subterfuges psychobiologiques dont notre espèce demeure l'otage . Car l'absurdité proprement militaire d'une dissuasion "nucléaire" qui sert de masque à la lâcheté de la "raison" dans les décadences, vous contraindra à vous forger une grille de lecture nouvelle, que vous qualifierez de "comparative".
Vous vous direz d'abord que la croyance officielle en l'existence proprement militaire d'une arme fantasmagorique par nature et par définition - puisque disproportionnée à la condition humaine - révèle la même bancalité que toute la théologie de la dissuasion posthume que l'Eglise a développée sur le fondement anthropologique du manichéisme de la Perse d'Artaxerxés. Or, M. Védrine écrit que la "dénucléarisation du monde ne peut être récusée", mais seulement en tant "qu'espérance à long terme", donc à fonds perdus, comme si les mécanismes mentaux qui commandaient la croyance terrorisée en l'excommunication majeure était soudainement devenue une arme substantifiée et dont le statut proprement théologique dans l'éternité relèverait tout à coup de son enracinement dans le temporel. "Néanmoins le monde n'est pas assez sûr et ne le sera pas assez avant longtemps pour que l'on puisse envisager de se priver de la garantie ultime que représente la dissuasion nucléaire."
Le serpent de la Genèse en est réduit à se mordre la queue, puisqu'il prétend maintenant nous procurer une arme dont toute l'efficacité censée mesurable sur un champ de bataille résidera précisément dans l'impossibilité, pour ce reptile, de retourner le dard et le venin contre lui-même. La pensée stratégique contemporaine se révèle donc embryonnaire, c'est-à-dire contradictoire et semi-animale ab ovo, puisque ce ne sera jamais la morsure fantasmée de la foudre biblique qui se révèlera "garante", mais seulement une foudre imaginaire et condamnée à ne jamais démontrer que son vain matamorisme. Que signifie la notion de "garantie ultime", puisque, par définition, une dissuasion tenue pour "garante", donc pour effective, ne méritera son nom que lorsque l'adversaire se sera démontré, ainsi qu'à ses congénères, l'inefficacité sur la terre de sa théologie de l'épouvante apocalyptique et, par conséquent, le caractère seulement onirique d'une catastrophe universelle?
Ce que prouve une dissuasion précisément "réussie" par un effet de l' échec de son mode d'emploi fantasmagorique, c'est que le "champ d'honneur" a été retiré de dessous les pieds de tous les pseudo-combattants; et cet évanouissement magique de la plateforme traditionnelle des opérations militaires des deux partis ne devient nullement la clé de la victoire de la sagesse d'un guerrier sur la folie de l'autre, mais seulement de l'impossibilité, pour le singe pseudo apocalyptique, de jamais engager réellement les hostilités entre plusieurs serpents de mer armés d'un venin mythologique par nature. L'examen de ce cercle vicieux vous aidera à élaborer une dialectique militaire enfin fondée sur la mise en parallèle du mythe de la dissuasion par le recours à l'excommunication scripturaire de l'Eglise avec celle du mythe mécanisé dont vos congénères acéphales s'imaginent maintenant effectivement pourvus sur la terre.
9 - Un génocide raté
Mais pourquoi, vous direz-vous, la dissuasion exclusivement mythologique des croyants est-elle plus difficile à terrasser dans les esprits que celle du nucléaire - autrement dit, pourquoi le Saint-Siège se garde-t-il bien de renoncer à son sceptre théologico-satrapique - sinon parce qu'il sait que les vraies armes de guerre de l'humanité ne sont autres que ses croyances ? Si les armées d'Henry IV d'Allemagne avaient éclaté de rire à l'annonce de leur expédition instantanée en enfer par une décision motu proprio du Vatican, l'empereur des Germains ne se serait pas gelé les pieds à Canossa.
Quant à l'efficacité indirecte et latente des armes nucléaires, elle durera le temps de l'inhibition et de la paralysie d'une réflexion militaire prudemment placée sous le contrôle étroit de l'orthodoxie nucléaire des Etats du Moyen Age actuel. Mais si tout le monde sait désormais qu'Hiroshima et Nagasaki seraient encore debout dans le cas où le Japon aurait possédé l'arme atomique en 1945, nos stratèges ne reçoivent pas encore à Saint-Cyr et à l'Ecole militaire la formation anthropologique et théologique qui seule leur permettrait de placer le polythéisme nucléaire sur l'échiquier de la raison militaire de demain.
De plus, l'argumentation demeurée semi-rationnelle des anthropologues officiels, des psychologues d'école, des historiens et des philosophes tridimensionnels n'exerce aucune prise sur les neurones traditionnels du sacré simiohumain, et cela du simple fait que les tortures éternelles de l'enfer ne seraient réfutables que si l'ignorance, la crédulité et la sottise figées se laissaient terrasser par des arguments d'infirmes à leur tour. Pour l'instant le fantasmagorique religieux classique peut dormir sur les deux oreilles, puisqu'il a disqualifié toute réfutation de l'absurde. Au contraire, dit la foi, s'il faut croire, c'est justement parce que seul l'absurde connaît le vrai et l'exprime à coup sûr.
10 - La raison et le "Connais-toi"
Mais le nucléaire militaire offre prise, lui, à la vérification impie de son inanité stratégique, donc à la pertinence de la mécréance qui en réfute l'absurdité: jamais, disent les satanés logiciens, jamais une bombe atomique ne sera larguée par un Zeus ridiculement débarqué dans les dévotions que distille le temporel à son tour dès lors que l'adversaire se trouvera armé du même sceptre du suicide que lui-même. Si deux ou plusieurs matamores du néant, tous mollement assis sur des coussins de velours, tiennent la même mèche des ténèbres à la main - celle de leur vaporisation dans une nuit éternelle - observez avec les yeux distanciateurs de Lucifer, le "porteur de lumière", la paralysie mentale des héros de leur propre trépas. L'instinct de conservation est armé de syllogismes tellement opiniâtres qu'ils ne se laissent pas mettre catéchétiquement a quia.
Depuis un demi-siècle, toute l'humanité du funèbre le sait pertinemment, et si elle se cache encore le secret de ses funérailles manquées, c'est exactement sur le même modèle d'enfouissement et d'ensevelissement des lois du temporel que l'Eglise, qui n'est pas près de dénucléariser sa théologie des tortures posthumes. Mais déjà Israël sort peu à peu du cocon de son paradis spéléologique pour s'avouer qu'il lui faut se hâter, parce que l'Iran ne sera plus explosable dans l'atmosphère quand il serrera dans son poing une tombe rendue efficace par son irréalité. Seul Dieu a réussi son coup de dés, mais par une ruse dont il est facile d'éventer l'odeur : s'il ne s'était pas malignement gardé un survivant non vaporisé pour témoin, son saint génocide ne jouirait pas de sa seule existence véritable, celle qu'il occupe dans l'imagination religieuse de la créature.
Mais les peuples sépulcraux d'aujourd'hui ne sont pas encore dotés de la capacité cérébrale de s'esclaffer devant le nucléaire auto-neutralisé comme ils éclateraient de rire si Benoit XVI excommuniait d'une chiquenaude les Juifs, les musulmans ou les protestants du XXIe siècle; et les prophètes de l'intelligence crient dans le désert que l'homme est un animal guerrier à titre inguérissable et que s'il se repose sur le fantasmagorique funéraire censé le protéger, il sera terrassé sur son sol avec les armes proportionnées à sa taille que l'ennemi aura perfectionnées.
11 - Le nucléaire et la politique du fantastique
Dans cette optique, l'aspect le plus saisissant de la théorisation des lauriers du nucléaire que M. Védrine a esquissée en aval n'est autre que les retrouvailles de l'alliance du fantastique infernal contemporain avec la plus vieille connaissance des neurones du genre humain: la scolastique. C'est ainsi que son évaluation énumère avec un haussement d'épaules à peine dissimulé les divers commandements tout formels que la France des nouveaux sorbonagres et sorbonicoles a obtenus du fabuleux otanien, alors que ces "commandements" sont verbifiques, fantomatiques et oniriques par nature et par définition. Voyez comme leur nature purement idéelle les condamne à l'inanité militaire et politique de la scolastique qui gangrène leur concept même de "guerre": aucun Tamerlan ne consent à se profiler à l'horizon, aucun Gengis Khan ne fait étinceler sa cuirasse dans le lointain, aucun géant à réduire en poussière ou à tailler en pièces ne défie la vaillance des don Quichotte du néant. Mais M. Védrine ne voit pas que la planète est devenue la risée d'une sophistique du nucléaire; et pourtant, il semble quelquefois rire sous cape des vaines fulgurances de cette scolastique. Comment cela est-il possible?
Ecoutez-le évoquer en passant et négligemment, semble-t-il, le "plaisir d'exister" des moutons de Panurge ou de ceux de Don Quichotte confondus dans le vide et le rien d'un attrape-nigaud digne de la théologie du Moyen Age. "Même s'il n'est pas question de mener à tout prix des opérations pour le plaisir d'exister (…), seules trois opérations militaires sont en cours, dont une seule est véritablement importante: l'opération Atalante de lutte contre la piraterie maritime au large de la Somalie."
Mais alors, que penser du "plaisir d'exister" auquel s'exerce le "service européen d'action extérieure", qui demeure purement gesticulatoire, que penser du "Système national d'alerte avancée" (radar et satellites) qui "vise à surveiller les missiles balistiques, à déterminer l'origine des tirs et à favoriser l'aide aux populations?" Qu'enseigne à l'anthropologie critique la scolastique du "plaisir d'exister"?
Car l'Occident de la raison est né de la victoire cruelle d'Abélard (1079-1142) sur la scolastique des idées pures de son maître Guillaume de Champeaux, qu'il a réfuté devant tous ses élèves et dont il a pris la place. Quatre siècles plus tard, la Renaissance n'a fait que prendre le relais de ce pionnier extraordinaire de la dissection du concept; puis cinq siècles encore ont passé pour qu'apparaisse le spectacle ridicule du triomphe d'une scolastique militaire dont le fabuleux verbal enserre désormais la planète des armées et des cervelles. M. Védrine frôle à chaque pas la découverte de la titanesque scolastique des modernes quand il raconte sans rire le "plaisir d'exister" qui inspire "l'action extérieure" des "missiles balistiques", dont l'origine demeure aussi mystérieuse que le pain de la messe, mais contre le tir imaginaire desquels il est urgent de " favoriser" - c'est la moindre des choses - la protection des populations!
Mais sachez, les enfants, que l'histoire est riche en découvreurs qui n'ont rien compris ce que leur inconscient savait déjà et leur enseignait en secret. Le génie foudroyant d'Abélard lui fait réduire l'idée mythique de Platon au concept, puis le concept à l'instrument rudimentaire d'une parole orpheline de toute science du singulier. Mais si l'individu échappe à la saisie langagière depuis le Théétète de Platon, il n'y a plus de "plaisir d'exister" pour la scolastique! Décidément, M. Védrine réfute la scolastique comme M. Jourdain faisait de la prose sans le savoir. Cela donne à réfléchir: comment se fait-il que le cerveau humain ne découvre jamais que ce qu'il savait déjà sans seulement s'en douter?
12 - La signification anthropologique de la scolastique
C'est ici que le concept de scolastique accède à son sens anthropologique ultime: car de même que l'Eglise romaine s'était construite, en plusieurs siècles de pieux efforts, une cosmologie verbale dont l'ubiquité dans les imaginations imposait le vocabulaire célestiforme et les armes dévotes de sa sophistique à tout l'univers, l'Amérique a réussi à son tour et en trois générations seulement, le tour de force et de passe-passe de tisser un réseau para-théologique dont la puissance vassalisatrice dépasse désormais celle de la foi du Moyen Age. Voyez comme les porte-avions d'une scolastique mondiale de la Liberté tracent maintenant sur tous les océans du monde les sillons d'une profondeur sans précédent et non moins omnipotente dans les esprits qu'autrefois la cosmologie de la Genèse, voyez l'ubiquité impérieuse des songes exercés à leur propre "plaisir d' exister" dans les têtes. Si la France s'engageait dans un combat à l'échelle mondiale contre la scolastique politique, si un nouvel Abélard étudiait, la loupe à l'œil, la greffe du vocabulaire et de la syntaxe du mythe de la Liberté sur l'histoire du monde , si le nominalisme moderne redonnait à la planète tout entière le souffle d'une civilisation de la lucidité, elle retrouverait également l'universalité de sa vocation cérébrale et elle occuperait à nouveau la place d'une avant-garde invincible de l'intelligence de l'humanité qu'elle avait conquise au XVIIIe siècle.
On voit que le rapport Védrine ne révèle toute sa portée que si sa signification cachée s'éclaire à la lumière d'une problématique anthropologique elle-même articulée avec une politique et une histoire en évolution; car l'échiquier mental sur lequel l'évaluateur - l'aestimator des Anciens - déplace ses pièces montre à chaque pas les lacunes et les failles de sa dialectique, comme si la vassalisation scolastique ne parvenait à se donner en spectacle qu'incidemment, sporadiquement et à l'aide de quelques lucarnes entrebâillées. C'est que toute l'entreprise de M. Védrine se trouve prise en aval dans le réseau vaporeux, mais tyrannique, de la déraison nucléaire dominante, alors qu'en amont, il s'agit d'escalader l'Olympe d'une scolastique du mythe de la Liberté et de réfuter les songes de la démocratie - celle qui permet précisément aux Etats-Unis de régner à l'école de l'irréalité de ses potentats du langage.
Mais voyons combien la cécité intellectuelle devient semi volontaire dans les décadences et émascule la diplomatie rationnelle. Le mythe nucléaire brandi comme une ligne Maginot mentale permet, en réalité, aux Etats-Unis de rendre la France et l'Europe complices d'une humiliation inutile et irrationnelle de la Russie post-soviétique. Car l'extension des Etats-Unis jusqu'aux murs du Kremlin, qui demeure le seul objectif réel de la Maison Blanche, se trouve pleinement satisfait au prix d'une régression européenne de la connaissance scientifique du genre humain.
"Au Sommet de Lisbonne, en novembre 2010, la France a obtenu (malgré les demandes de l'Allemagne et grâce à un arbitrage américain) qu'il soit réaffirmé que la stratégie de l'Alliance reste fondée sur la dissuasion nucléaire, comme le souligne le Concept stratégique adopté à cette occasion : " tant qu'il y aura des armes nucléaires dans le monde, l'OTAN restera une alliance nucléaire. Lors de ce Sommet de Lisbonne la France a aussi accepté que l'OTAN décide de se doter d'une capacité de défense des territoires et des populations contre les missiles balistiques, sur la base d'une extension du programme de défense de théâtre (ALTBMD : Active Layered Theatre Ballistic Missile Defence)." Autrement dit, la gestuelle atomique de la France n'est que le masque matamoresque de la capitulation totale sur le fond.
Mais comment se fait-il que le terme de théâtre fasse irruption comme à point nommé sur les planches de la scolastique diplomatique et que le Tartuffe de Molière s'empare soudainement de toute la scène?
13 - L'avenir de l'Europe de l'intelligence
Le nouveau siècle des Lumière sera celui d'une France fondatrice de l'anthropologie politique et critique du IIIe millénaire, et cette anthropologie étudiera la seconde chute de l'humanité dans la scolastique, donc les fondements les plus originels d'une espèce vassalisée à l'école de la mythification tartuffique de son propre langage. Alors seulement, le même parallélisme qu'à l'époque de Voltaire apparaîtra entre le combat pour les droits civiques et pour les pouvoirs de l'intelligence rationnelle; et, à nouveau, on verra qu'il n'y a pas de libération de la pensée politique sans coalescence avec l'émancipation de l'encéphale méta-théocratique de l'humanité. Simplement, l'exploration des souterrains vassalisateurs du sacré conduira à la découverte des arcanes anthropologiques de la pensée dogmatique et de son Dieu scindé entre l'administration de ses tortures éternelles sous la terre et l'octroi de ses récompenses corporelles dans le ciel.
Alors le "Connais-toi" d'une Europe de l'intelligence répondra à nouveau à une question têtue: "Qu'est-ce que l'esprit?"
La pause hivernale prendra fin le 5 janvier.
Le 22 décembre 2012