Elus & Maires

"Mort de la Démocratie représentative" par Jacques MYARD (CNR)

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Le 19 avril 2018

Les politologues s’accordent à penser que la Constitution de la Ve République voulue par le Général de Gaulle a été le facteur primordial de la stabilité politique en favorisant le fait majoritaire.

Elle a fonctionné comme une minerve politique pour un Président faible comme François Hollande, évitant une crise de régime. Certains pourraient en déduire qu’elle ignore ou méprise la réalité politique en permettant à des Présidents de rester en fonction alors qu’ils n’ont plus la confiance de la Nation : c’est oublier que les frondeurs n’ont pas voulu franchir le Rubicon et que leur fronde s’est arrêtée avant la crise du régime, laquelle aurait entraîné de nouvelles élections législatives et sans doute après de nouvelles élections présidentielles.

Parmi les projets de réformes voulues par Emmanuel Macron qui confond, à l’évidence, agitation de communication et réformes structurelles d’envergure, le projet de réforme institutionnelle qu’il a en tête est certainement le projet le plus dangereux pour la stabilité politique du pays. C’est un concours de démagogie qu’il convient de combattre, pied à pied, pour exiger un référendum et faire échec à un Président qui veut casser la démocratie représentative pour faire régner sans vergogne le pouvoir technocratique.

- La réduction du nombre des députés et des sénateurs

La réforme concernant le nombre des parlementaires relève de la loi organique, celle de leur mode de scrutin de la loi ordinaire.

C’est là un thème populaire, on connaît l’antienne : « ces députés sont des nantis qui s’en mettent plein les poches sur le dos du bon peuple, il y en a trop ».

La réalité est tout autre :

Les 577 députés français ne sont pas les plus nombreux en Europe : en Allemagne, ils sont 598, en Grande-Bretagne 650 et en Italie 630.

Ils sont raisonnablement indemnisés, - leur indemnité est bien plus faible que celle de nombre de cadres ou dirigeants du secteur privé, voire public, à responsabilités égales, qui bénéficient d’indemnités de départ ou licenciements que les Parlementaires n’ont pas.

Rappelons qu’un parlementaire est disponible 7 jours sur 7 pour être très souvent l’objet de la vindicte populaire : c’est toujours agréable de dire son fait à un député, ça soulage, comme le pratiquent certains bonimenteurs médiatiques grassement rémunérés.

Si Macron veut réaliser des économies dans la structure institutionnelle, pourquoi ne s’attaque-t-il pas aux dix-millefeuilles territorial avec ses régions mastodontes, des intercommunalités dispendieuses et inefficaces ? Ce serait là un gisement d’économies gigantesques.

Mais il est plus simple d’attaquer les Parlementaires, en flattant la démagogie du comptoir du café du commerce.

La diminution du nombre des Parlementaires, et surtout des députés, a une conséquence redoutable pour la capacité d’indépendance du Parlement.

Réduire les députés d’un tiers ramènera leur nombre à 404 dont 343 seront élus dans des circonscriptions, et 15 %, soit 61 députés élus sur des listes à la proportionnelle. Chaque circonscription aura plus de 200 000 habitants. Le député sera alors incapable de prendre à bras le corps sa circonscription, de la connaître, de la vivre. Il deviendra pour les électeurs un mythe : le lien charnel de proximité sera brisé.

Son élection, il ne la devra, en réalité, qu’au choix des appareils politiques qui l’investiront, a fortiori s’il figure comme candidat sur une liste proportionnelle.

Le Conseil Constitutionnel jugera-t-il cette réduction conforme à la Constitution en raison de l’écart de représentativité de chaque député par rapport à la population et aux électeurs des circonscriptions ? Ce n’est pas certain.

De plus, l’introduction d’une dose de proportionnelle peut provoquer de l’instabilité politique si le résultat des élections législatives donne une majorité relative et nécessite une alliance avec les députés d’un petit parti.

Bref, le pays risque fort d’être ingouvernable à terme.

Il suffit d’examiner ce qui se passe en Allemagne : les petits partis font ou défont les majorités parlementaires et s’il y a une grande coalition, ce sont les extrêmes qui croissent et embellissent.

Certains vont me reprocher d’être contre la représentation des petits partis qui ne peuvent être présents à l’Assemblée nationale.

Il est facile de réfuter cette critique.

Le scrutin uninominal majoritaire à deux tours a toujours assuré une majorité à l’exécutif, ce qui est légitime, mais surtout, ce scrutin n’est pas injuste.

L’électeur a deux choix : au premier tour, il vote pour son candidat préféré, au deuxième tour, si celui-ci n’est plus en lice, il opte pour sa seconde préférence. Dès lors, le suffrage universel est parfaitement respecté.

Il est faux de prétendre que ce système est injuste. Il permet de construire une majorité pour assurer une stabilité et interdire les majorités tournantes dont a pâti la IVe République, lesquelles ont provoqué la risée du peuple et une multitude de gouvernements.

- La limitation à trois mandats

La limitation à trois mandats relève en principe de la loi organique mais aussi sans doute d’une modification de la Constitution au regard de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen ; c’est une belle sottise, produite par une cervelle qui n’a jamais exercé la gestion d’une collectivité.

Le mandat de Maire n’est pas un métier, on le sait, c’est une vocation mais c’est aussi une expérience.

Viendrait-il à l’esprit d’un membre d’une banque d’affaires de dire : «  il faut limiter à trois dans le temps les mandats des membres du Conseil d’administration, et interdire les cumuls de mandats de conseils d’administration » ? Ce serait proprement ridicule, une telle idée ne viendrait pas à l’esprit de la nomenklatura bancaire...

De fait, la durée moyenne du mandat de député est de 1,6 mandat ; c’est dire que le renouvellement est constant ; celui de Maire est plus long car il y faut de l’expérience et de la constance.

Il est vrai, des ténors politiques ont été élus et réélus pendant 20 ou 40 ans, pour le bien du pays au demeurant, grâce à l’expérience qu’ils ont acquise.

Assez de démagogie !

Ces trois mesures, la réduction du nombre de députés, l’introduction de la proportionnelle, la limitation du nombre de mandats poursuivent, en réalité, un seul objectif : casser la démocratie représentative au profit de la technocratie chère à Emmanuel Macron, le seul monde qu’il connaisse.

Le Parlement discipliné mis au pas !

L’avant-projet soumis au Conseil d ‘Etat laisse pantois et illustre parfaitement la volonté d’Emmanuel Macron de mettre au pas le Parlement sous couvert d’une hypocrite rationalisation des procédures parlementaires. La lecture de ce texte (publié dans Le Monde du 15-16 avril 2018) est édifiante!

Renforcement des pouvoirs du Gouvernement pour déclarer irrecevables des amendements

Renforcement des pouvoirs du Gouvernement pour inscrire à l’ordre du jour des assemblées des projets de loi

Réduction du temps d’examen de 70 à 50 jours du projet de loi de finances par les assemblées. Le délai passé, le Gouvernement pourra légiférer par ordonnance

Si, en outre, le pouvoir maintient l’encadrement du droit d’amendement des députés, il porterait une atteinte inadmissible à leur capacité à faire la loi. Ce droit étant un droit constitutionnel, tout encadrement nécessiterait une révision constitutionnelle.

Il est, au demeurant, impardonnable de constater que les députés du groupe majoritaire LREM ont interdiction dans leur règlement intérieur de présenter des amendements ou des propositions de loi sans l’aval de leur groupe.

Soyons donc vigilants et ne lâchons rien !

Les autres réformes envisagées nécessitent une révision de la Constitution :

- la suppression de membre de droit du Conseil constitutionnel pour les anciens chefs de l’Etat,

- la transformation ou suppression du Conseil économique, social et environnemental,

- et la suppression de la Cour de la justice de la République, appelée à juger les ministres pour des fautes commises dans l’exercice de leur fonction. La critique est connue : c’est une justice d’exception ; oui, mais est-ce la seule ? Les prud’hommes, les juridictions de commerce le sont aussi. Il est légitime de poursuivre des ministres qui fautent dans leurs fonctions mais attention à ne pas organiser un jeu de quilles permanent à des fins de déstabilisation avec des recours fallacieux et malveillants.

La Corse et le réchauffement climatique dans la Constitution.

Quant à la mention de la Corse dans la Constitution, elle constitue une boîte de Pandore et un danger pour l’unité de la République. Selon l’avant-projet du Gouvernement, les collectivités comme la Corse auraient un droit à la différenciation dans le cadre de la loi dans un nombre limité de compétences.

Le texte est, certes, prudent, mais il est fort possible que cette porte entrebâillée s’ouvre en grand sous l’action politique des champions de l’ethnicisme. Il y a là un danger pour l’égalité des Français et l’unité de la République !

Le réchauffement climatique, quant à lui, ne relève pas de la compétence de la Constitution.

***

La Constitution de la Ve République a déjà été réformée plus de 24 fois, c’est excessif ! Je me suis personnellement opposé à plusieurs reprises à ces réformes, qu’il s’agisse de l’abandon du septennat, ou de la réforme de 2008 proposée par Nicolas Sarkozy.

La réforme d’Emmanuel Macron est mortelle pour la Constitution de la Ve République : elle est dangereuse pour la stabilité politique de la Nation, elle place le Parlement sous le diktat du Gouvernement, des appareils politiques et de l’administration technocratique qui prend le pas sur les élus.

J’estime, pour ma part, que c’est un casus belli.

Un tel abaissement et déni de la démocratie représentative ne peuvent être adoptés par le Congrès de Versailles, ce chamboulement institutionnel doit être soumis au peuple par référendum.

Jacques MYARD

Membre Honoraire du Parlement

Maire de Maisons-Laffitte

Président du Cercle Nation et République

SOURCE:

https://www.nationetrepublique.org/

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