CHINE : "Le nouvel an chinois entraîne le déplacement de Millions de Chinois !" par Thibaud Andre (SHANGAÏ) - Bonne année de la Chèvre !
Entre respect de la tradition et realpolitik autoritaire : les hésitations de la Chine confrontée aux déplacements de population en période de nouvel an chinois
La saison dite « Chunyun », ou Festival du printemps, qui précède la date du nouvel an chinois, représente le plus grand mouvement annuel de population au monde. Pendant cette période de 40 jours, où des centaines de millions de Chinois retournent dans leurs familles pour préparer les célébrations du nouvel an, le Ministère du Transport a recensé en 2014 un total de 3,2 milliards de trajets individuels. Autant dire un sacré pique. La pression sur les infrastructures de transport est telle que les autorités chinoises, pour assurer la sécurité des voyageurs, et éviter les problèmes de congestion, commencent à réfléchir à encadrer plus fermement les départs.
Toutes les corporations et toutes les catégories sociales sont concernées par ce phénomène de migrations : étudiants, ouvriers, cadres de grandes entreprises. Et si les moyens de locomotion utilisés ne sont pas les mêmes, du vélo au billet d’avion première classe, tous ces migrants se croisent en une myriade de points d’interconnexion, véritables hubs que le ministère des transports a le plus grand mal du monde à réguler. En conséquence, certains cadres du parti et fonctionnaires nourrissent l’idée que, plutôt de s’attaquer aux symptômes, il faudrait gérer en amont les déplacements de population. Madame Yuet-Ming, responsable de la planification des chemins de fer au Ministère du Transport, est partisane de l’instauration d’un système de zonage. Une idée qu’elle a d’ailleurs eu lors de son année d’échange universitaire à la Sorbonne, et qu’elle nous détaille dans un Français impeccable. « En France, vous avez trois zones de départs en vacances, A, B et C. Cela peut paraître tout simple, mais c’est une idée brillante ! Si nous parvenions à mettre en place ce type de zones en Chine, cela permettrait de fluidifier les déplacements de la période de Chunyun. Il faudrait bien entendu beaucoup plus de zones qu’en France. Tout l’alphabet y passerait ! » finit-elle au bord du fou rire.
D’autres idées voient ainsi le jour face à cette situation. Un marché semble notamment sur le point de naitre pour le toujours florissant commerce en ligne chinois. « Les chinois qui souhaitent rejoindre leur famille pour le nouvel an pourraient continuer d’acheter leurs billets aux guichets ou sur les sites webs des compagnies de transport, qu’elles soient routières, ferroviaires ou aériennes » nous détaille Thomas Leprince (fondateur des sociétés Le Peignoir ou GE). « Mais ces billets intégreraient la quasi-totalité des moyens de transport utilisés pour le trajet défini. Aussi une date de départ serait établie, qui serait choisie non pas par le client, mais par les autorités, en fonction d’un logiciel de planification des déplacements. » Le prix du billet serait ensuite réparti entre les différentes entreprises de transport impliquées dans le déplacement. Quant à la perte de liberté de choisir du client, elle serait compensée par un trajet intégré et donc aux interconnections plus aisées, mais aussi par un prix avantageux, permis par les économies de gestion réalisées par les entreprises, et peut-être des subventions étatiques.
Situation subi depuis de nombreuses année, la folie douce du nouvel an chinois est en passe d’évoluer vers des modèles politiques, disciplinaire voir économique nouveau. La tradition pourra-t-elle perdurer à cette évolution « moderne » ? Rien n’est moins sur.
Thibaud Andre (SHANGAÏ)*
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(*) Thibaud Andre est un français exilé à SHANGAÏ et travaille notamment pour Daxue Consulting – market research China.
Thibaud ANDRE est aussi le correspondant de POLITIQUE-ACTU.com en CHINE.