« Le "Droit à l'erreur" ? Encore de la Com’ » par Etienne TARRIDE (Billet)
Amis, Compagnons et Camarades
Avant que nous soyons submergé par le tsumami Darmanin dans toutes nos gazettes et dans toutes nos radios et télévisions il importe de relativiser la portée d'un texte emblématique, celui du fameux " Droit à l'erreur".
Les contribuables, redevables et assujettis qui déclareront spontanément avoir commis une erreur ou le reconnaitront non moins spontanément en cas de contrôle seront exonérés de pénalité de retard et d'amende. Tout se passera comme à la SNCF si vous voyagez sans billet et que vous le déclarez spontanément aux contrôleurs qui se situent à l'avant du train.
Un premier bémol : plusieurs procédures comparables existent déjà en ce sens.
- Le rescrit fiscal des articles L80 A et L80 B du Livre des Procédures Fiscales
- Le pouvoir de remise de l'administration quant aux pénalités ou intérêts de retard
- La mise en place régulière de "cellules de dégrisements" pour qui a dissimulé au fisc des avoirs à l'étranger
- Le pouvoir de transaction de l'Administration des Douanes, pouvoir portant non seulement sur les pénalités et intérêts de retard mais aussi sur le principal (la TVA à l'importation le plus souvent).
- Plus généralement l'Administration dispose déjà du pouvoir de poursuivre ou de ne pas poursuivre en fonction des circonstances de l'espèce.
Le "Droit à l'erreur" n'est en rien une innovation ou une "révolution culturelle" comme on commence déjà à nous le dire mais une amélioration à portée réduite de pratiques plus ou moins anciennes.
Il y a fort à parier, pour autant, qu'il ne sera que peu utilisé sauf peut-être dans les premiers mois et par des particuliers ou des entreprises qui le regretteront souvent.
La raison en est simple : Faire valoir son Droit à l'erreur comme demander une transaction ou une remise signifie avouer.
Des lors, si des doutes existent encore sur la commission effective d'une infraction ou d'un abus, que ce soit en matière fiscale, en matière de droit du travail, en matière de pratique loyale de la concurrence, en matière d'hygiène et de sécurité, en un grand nombre d'autres matières moins fréquentes, aucune défense au fond ne peut plus être présentée devant le Juge, qu'il s'agisse du Juge pénal, du Juge de l'impôt ou du Juge de la sécurité sociale.
Le Droit à l'erreur bénéficiera surtout à l'Administration qui verra s'éloigner deux de ses préoccupations essentielles, l'obligation de rapporter la preuve, la crainte de la prescription.
Cette prétendue nouveauté correspond strictement aux souhaits des pouvoirs publics, et notamment de Bercy. Tous les ministres ou anciens ministres de l'économie du budget ou des finances ont été ou sont encore harcelés sur ce thème.
L'habillage de la chose par un ancien ministre devenu Président et par le ministre actuel constitue un pur effet d'annonce. Une nouvelle opération de communication.
Il ne faut pas s'y laisser prendre.
Etienne Tarride*
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*Etienne TARRIDE - ancien avocat au barreau de Paris, gaulliste de gauche - publie des billets en exclusivité pour POLITIQUE-ACTU.COM. Il est aussi romancier.