Police & Justice : "Viry Chatillon" billet d'Etienne TARRIDE
[Le 8 octobre 2016, une vingtaine de personnes avaient pris d’assaut deux voitures de police dans le quartier de la Grande Borne. THOMAS SAMSON / AFP]
__
Mardi 20 avril 2021.
Chers amis
Certains d'entre vous espèrent peut-être connaitre mon opinion sur la décision de justice relative au crime de Viry Chatillon.
L'accueil scandalisé fait à cette décision de Justice illustre de manière quasiment parfaite notre schizophrénie collective en matière de Justice :
Nous affirmons collectivement qu'il vaut mieux un coupable en liberté qu'un innocent en prison. Nous sommes individuellement persuadés qu'il vaut mieux un innocent en détention qu'un coupable en liberté. Dans l'abominable affaire de Viry Chatillon, la plupart des gens estiment qu'il fallait mettre en prison tous les accusés, et tant pis si l'un ou quelques uns d'entre eux n'étaient pas là.
Exprimé en termes plus topiques, chacun d'entre nous ou presque estime que dans les affaires graves, le doute doit profiter à l'accusation.
Heureusement, la Justice, jusqu'à présent, ne cède pas à la tentation de la popularité.
Nous sommes également schizophrènes quand nous réclamons une justice ultra rapide (ces délinquants qu'on retrouve dans la rue dès le lendemain) tout en pleurnichant sur les malheureux qui passent en comparution immédiate après une nuit au poste dans une cellule collective glacée ou surchauffée selon la saison. Dans les affaires délicates la justice ne peut pas être aussi rapide qu'on le souhaiterait.
La Justice a pour fonction de gérer les échecs de la société. Ces échecs existeront toujours. Nous pouvons les limiter. L'arme maitresse dans ce domaine reste la police de proximité, mais beaucoup plus proche qu'il n'a jamais été pratiqué. Soutenir que les policiers n'étaient pas là pour jouer au football avec les jeunes gens est une erreur. Il faut au contraire, et les policiers municipaux peuvent largement tenir ce rôle, que les policiers participent activement à toutes les manifestations collectives, du sport aux fêtes, des repas collectifs quand il redeviendront possibles, des voyages en commun.
L'objectif est de permettre à tous les gamins et toutes les gamines qui se sentent glisser de trouver un interlocuteur sur qui les conseille et ne leur demande pas de dénoncer leurs copains. C'est la création de ces " grands frères" au bon sens du terme et de ces Grandes soeurs que la Loi doit prévoir d'urgence.
Etienne Tarride*
__
*Etienne TARRIDE - ancien avocat au barreau de Paris, gaulliste de gauche - publie des billets régulièrement sur POLITIQUE-ACTU.COM. Il est aussi romancier.
__
dossier :