« Réforme Constitutionnelle 2018 : Remarques préalables » par Etienne TARRIDE (Billet)
Chers Amis
J'ai commencé à regarder de manière un peu détaillée les différents éléments qui pourraient être concernées par la réforme des institutions telle que Macron semble la prévoir.
Cette lecture n'est pas spécialement distrayante mais je la crois utile pour éviter d'engager de batailles sans fondement. Je souhaite que vous adressiez cette étude à nos amis qui voudraient en prendre connaissance et en débattre.
Pour fixer les idées un rappel de la hiérarchie des textes envisageables en l'espèce et des procédures à respecter.
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HIERARCHIE DES TEXTES
Trois catégories de textes sont à prendre en compte
- Les Lois Constitutionnelles
- Les Lois Organiques
- Les Lois ordinaires.
PROCEDURE
La Loi ordinaire est votée par le parlement. L'Assemble Nationale a le dernier mot.
La Loi Organique est votée par le Parlement. En cas d'opposition du Sénat, elle doit être votée par l'Assemblée Nationale à la majorité absolue. Aucune Loi Organique concernant le Sénat ne peut être adoptée sans l'accord de la majorité su Sénat.
Les Lois Constitutionnelles doivent être votées par chacune des deux chambres puis par le Congrès à la majorité des trois cinquièmes.
Le Président de la République peut aussi soumettre à referendum la Loi Constitutionnelle votée par les deux chambres sans que l'Assemblée Nationale ait une quelconque supériorité par rapport au Sénat dont le vote majoritaire est requis. C'est l'article 89 de la Constitution.
L'article 11 de la Constitution permet au Président de la République de soumettre a referendum sur proposition du Gouvernement ou du Parlement des lois ayant pour objet, notamment, l'organisation des pouvoirs publics. Dans un tel cas l'approbation préalable du Parlement n'est pas requise.
LES MODIFICATIONS CONSTITUTIONNELLES ENVISAGEES
Une seule des reformes envisagées suppose l'adoption d'une Loi Constitutionnelle, la réforme de la Cour de Justice de la République, c'est à dire de la juridiction chargée de juger les ministres ayant commis des délits et des crimes dans l'exercice de leurs fonctions.
S'agissant du Conseil Supérieur de la Magistrature, il ne sera possible de se prononcer qu'au vu du texte lui-même et de ce qu'il prévoira.
Les réformes a portée politique ne sont pas des réformes constitutionnelles. Ce sont les articles 24 et 25 de la Constitution qui le précisent
Le nombre des députés et sénateurs, l'inéligibilité supplémentaire résultant du non cumul des mandats relève de la Loi Organique. Des lors deux conditions sont requises. La majorité absolue du l'Assemblée Nationale et l'accord majoritaire du Sénat pour ce qui concerne les modifications apportées à son propre fonctionnement, et notamment le nombre des Sénateurs.
Le mode de scrutin relève de la Loi Ordinaire des lors que l'Assemblée reste élue au suffrage universel direct et le Sénat au suffrage universel indirect. Il n'est donc besoin ni d'une réforme constitutionnelle ni d'une Loi Organique.
La seule question qui pourrait se poser reste la décision que pourrait prendre le Conseil Constitutionnel quant à la cohabitation au sein d'une même Assemblée de Députés élus selon des modes de scrutin différents. C'est une analyse qu'il faudra faire tant le Conseil Constitutionnel est devenu imprévisible aujourd'hui.
La deuxième difficulté se présentera après le vote de la Loi Organique réduisant le nombre des Députés. Il s'agit du découpage électoral nouveau qui supposera l'approbation de la commission indépendante prévue par la réforme de 2.008 et le vote d'un texte toujours risqué à l'Assemblée.
Bien sûr, Emmanuel Macron pourra toujours avoir recours au referendum de l'article 11 sans passer le moins du monde par les Assemblées. Ce serait une épreuve de force, mais je vois mal comment les Gaullistes pourraient soutenir une position hostile rigoriste s'agissant de la gestion juridique.
La synthèse à tirer de ces observations reste qu'Emmanuel Macron fera ce qu'il voudra avec l'Assemblée Nationale, et obtiendra sans recours au peuple la ou les majorités nécessaires au sein de cette même Assemblée. Il ne pourra sans doute pas imposer quoi que ce soit au Sénat, et notamment pas la réduction du nombre de sénateurs.
Ce serait une lourde erreur de s'engager dans une bataille juridique compte tenu des éléments ci-dessus rappelé.
C'est une bataille politique qui s'impose, et notamment sur l'adoption de la proportionnelle.
Etienne Tarride*
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*Etienne TARRIDE - ancien avocat au barreau de Paris, gaulliste de gauche - publie des billets en exclusivité pour POLITIQUE-ACTU.COM. Il est aussi romancier.