"Le sommeil, c'est bon pour le cerveau" par le Dr Steven Laureys - chronique anachronique de Hubert de Champris
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Le 25 mars 2024,
Le Professeur Steven Laureys s’inscrit dans cette lignée de chercheurs francophones, en l’occurrence belge et en l’occurrence encore jeune, teintant leur propos de cette touche de légèreté, d’humour et de familiarité qui est comme le gage, le garant de leur sens de la pédagogie à l’égard du ‘‘grand public cultivé’’, et, aussi, une marque paradoxale de leur ‘‘sérieux’’.
Pour l’essentiel, nous retirons de l’ouvrage qu’au même titre que le tabac et les drogues dites douces, la prohibition d’un sommeil trop court et peu réparateur devrait faire l’objet de campagnes de politique publique. L’auteur nous content l’exemple de catastrophes (marée noire provoquée par le naufrage de l’Exon Valdez, explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl etc) engendrées par le manque de sommeil. La description des mécanismes, ensemble neurologiques et hormonaux, engendrant la survenue du sommeil constitue la majeure partie d’un livre censé être au fait des dernières découvertes en la matière. C’est donc au regard de ce critère que nous devons évaluer in fine l’intérêt de ce genre de livre.
Le traitement de la question du rêve est assez classique mais souffre d’un a priori restrictif en ce qu’il évacue l’hypothèse qu’il n’aurait pas qu’une vertu, dirions-nous ‘‘hygiéniste’’. Sous cet aspect, nous apprenons toutefois que le nombre, la récurrence de cauchemars chez un sujet sont souvent la marque d’un syndrome post-traumatique et le signe que la vertu « épuratrice » et réparatrice du rêve demeure, sur ce point, inefficace, insuffisante. Nous préciserons ceci : dans le cadre de sa fonction de retraitement au quotidien des informations reçues et vécues la veille par le sujet, il semble qu’alors ce vécu émotionnel profond, enraciné, répété ait été d’une telle intensité (en soi et, parallèlement, en rapport à la sensibilité réceptive du sujet) que ce travail immédiat d’expropriation, - nous dirions même d’exorcisme - du trauma, que le rêve aurait dû effectuer, n’a pas eu lieu. Ces cauchemars (qui sont donc des reviviscences de ce vécu) s’analyseraient donc comme des « bugs » neurocognitifs, des tentatives pour forcer le passage hors de soi du souvenir d’une souffrance, souvenir qui est en même temps souffrance. Sentiment et émotion que nous pourrions résumer par cette pensée de Louise-Marie de France, une fille de Louis XV : « Souffrir passe, avoir souffert ne passe pas. »
Les bienfaits de la mélatonine sont évoqués, mais trop succinctement, alors qu’elle constitue un moyen efficace d’endormissement sans effets secondaires. On aurait en conséquence dû mettre l’accent sur cette petite difficulté, paradoxale en la matière : ne serait-ce qu’un léger surdosage peut, au bout de quelques nuits, contrarier, contredire l’effet de cette semi-hormone. En effet, cette dernière agit sur la sécrétion des deux hormones thyroïdiennes T4 puis T3 : or, l’hyperthyroïdie – surtout au cours de cet ‘‘à-coup’’ nocturne – favorise l’insomnie (par élévation de la température corporelle et phosphorescence mentale). Ce désagrément survient surtout chez les hyperthyroïdiens (ou le type hyperthyroïdiens like ). C’est dire combien cette supplémentation en mélatonine, à tous points de vue saine, demande de doigté.
C’est à tort que le Pr. Laureys propage l’idée que l’exercice physique (sauf le sport en chambre précise-t-il avec son humour coutumier) n’est pas conseillé avant le coucher en raison de l’élévation de la température du corps qu’elle entraîne. Les études en la matière de ces cinq dernières années infirment la chose. (A notre sens, parce que les effets de décontraction musculaire et nerveuse du sport l’emportent sur l’inconvénient, ici, du métabolisme basal accru induit par le sport).
Enfin, dans la même veine de remarques, on déplorera que la GABA (acide gamma-aminobutyrique) ne soit mentionnée qu’une fois, alors qu’elle est un neurotransmetteur fort nécessaire aux anxieux et aux grands nerveux. Via la théanine, vous en trouverez en buvant le soir du thé vert. Si vous pratiquez en sus de l’exercice physique et que vous vous gorgez de bonnes oranges pleines de vitamine C, vous avez là les viatiques nouvellement consacrés par la science d’un bon sommeil.
Une prochaine édition revue et augmentée (par exemple en format Poches Odile Jacob) rendra compte du bien-fondé de notre propos.
Hubert de Champris
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PAGE EDITEUR: Dr Steven Laureys, Le sommeil, c’est bon pour le cerveau, Odile Jacob, 360 p., 22,90 €.
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