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"Politique étrangère et intérêt national" Jean-Pierre CHEVENEMENT

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Discours de Jean-Pierre Chevènement, devant le groupe de travail "politique étrangère de la France" de l'IFRI, jeudi 18 février 2016.

Politique étrangère et intérêt national

Introduction 

Principes 

La place de la politique étrangère dans les institutions peut être centrale ou subordonnée : c’est ainsi que Couve de Murville écrit « C’est devenu presque un lieu commun de dire que la Ve République pendant onze ans, fut d’abord sinon essentiellement, une politique extérieure, la pensée du général de Gaulle ayant été tout entière dominée par la volonté de rendre à la France dans le monde, la place et le rôle qu’il estimait devoir lui revenir, et son action, dans tous les autres domaines, ne visait qu’à réunir les moyens d’atteindre cet objectif suprême. » (1) 

Cette ambition n’a pas survécu longtemps au général de Gaulle. Les choix opérés par les Présidents Giscard d’Estaing et Mitterrand en matière européenne ont abouti à des transferts massifs de souveraineté que leurs successeurs n’ont nullement remis en cause, bien au contraire ; Notre diplomatie a conduit la France à revenir dans le giron de l’Alliance atlantique, et cela bien après la fin de la guerre froide : le retour à l’organisation militaire intégrée de l’OTAN intervient en 2008, presque vingt ans après la chute du Mur de Berlin. 

Pourtant l’indépendance nationale n’a rien perdu de son sens dans un monde « zéropolaire ». Reste à le démontrer, comme y incite le rapport Védrine sur la réintégration de l’organisation militaire de l’OTAN par la France. Si l’indépendance redevient le maître mot de notre politique étrangère, si la France continue à se définir comme pont entre les cultures et trait d’union entre les nations, alors la politique étrangère peut redevenir centrale dans notre politique car elle éclaire et donne sens à l’ensemble. 

Reste le problème des moyens : La France se flatte encore de disposer de la gamme complète des instruments de la puissance. A l’horizon 2050, elle peut théoriquement demeurer dans le peloton de tête des dix ou douze premières nations (Le P5, l’Allemagne, le Japon, l’Inde, le Brésil et un petit nombre d’« émergents »). Mais si l’érosion de sa substance matérielle, principalement industrielle, se poursuit, la contradiction apparaîtra entre une économie déclinante et le maintien des outils de sa puissance. C’est la question des moyens qui, alors, devient centrale. 

A quelles conditions soutenables la France peut-elle retrouver la croissance nécessaire à son maintien au rang des grandes nations indépendantes ? La dialectique de la fin et des moyens, dans le cadre des contraintes européennes que nous avons acceptées, pose le problème de la volonté politique. En d’autres termes, la France a-t-elle les ressources non seulement matérielles mais aussi morales qui lui permettent de rester une « grande nation » ?

I – L’intérêt national aujourd’hui 

1. De l’effacement au regain du sentiment national 

Peu de décisions aujourd’hui se prennent encore explicitement à l’aune de l’intérêt national (quel est sur tel ou tel dossier l’intérêt du pays ?). Le concept même est devenu évanescent. On évoque plus volontiers les « valeurs » qui fonderaient la politique étrangère de la France que son « intérêt » qui serait, par définition, médiocre. La référence aux « Droits de l’Homme », abstraitement définis, a relégué à l’arrière-plan l’intérêt du pays et l’adage gaullien selon lequel « il n’y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités ». On a oublié que le réalisme en politique étrangère était plus soucieux des moyens de la France et souvent plus conforme aux intérêts de l’Humanité : « aller à l’idéal et comprendre le réel », disait déjà Jaurès. 

Le sentiment de la France s’est affaissé, particulièrement dans les élites, depuis le début des années 1970, renouant ainsi avec une évolution déjà sensible dans les années 1920-1940. Fin du gaullisme ? Ressac à retardement des années quarante ? Remords colonial ? Choix de l’Europe, « notre avenir », ou tout simplement effet de trois décennies de « globalisation », comme disent les Anglo-Saxons, où l’idée de la France se dissout, presque par définition, dans le « global » ? 

Or, le vent a, semble-t-il, tourné. La crise de 2008 n’a pas été surmontée. La mécanique européenne s’est enlisée : avec la crise de la monnaie unique et celle des migrants dans l’espace Schengen, l’idéologie du « postnational » a fortement reculé dans l’opinion. Surtout, depuis les attentats de 2015, le peuple français se resserre autour de la Nation, de la République et de leurs symboles. Un regain de patriotisme se manifeste dans le peuple. La nation reprend des couleurs. Le besoin se fait sentir de « recaréner » la République pour affronter la zone de tempêtes dans laquelle nous sommes entrés, sans doute pour longtemps. 

2. Intérêt national, intérêt européen, intérêt de l’Humanité 

Pour relever la notion même d’intérêt national, il faut évidemment l’inscrire dans un « grand dessein ». Celui-ci peut-il être « l’Europe » ? Mais laquelle ? L’Union européenne à vingt-huit ? La zone euro à dix-neuf ? Ou la « Grande Europe », celle de la géographie, incluant la Russie ? Les contours de l’Europe sont flous. Le sentiment d’appartenance va d’abord à la nation. A la différence des Etats-Unis créés, au départ, autour de treize colonies britanniques, l’Europe est faite d’une trentaine de peuples dont l’identité s’enracine dans une Histoire séculaire, voire millénaire. L’impossibilité de faire émerger à vue d’homme une « nation européenne » rend illusoire aujourd’hui, et sans doute pour longtemps, l’idée d’un « grand saut fédéral ». On le voit avec la monnaie unique, coiffant une zone économique hétérogène où les écarts se creusent naturellement sans que des transferts financiers d’ampleur puissent les compenser, pour des raisons politiques plus encore que juridiques (clause de « no bail out » (2)). Beaucoup plus réaliste que l’idée d’une Fédération européenne, en l’absence d’un sentiment d’appartenance européenne assez puissant, apparaît l’idée d’une Confédération, tendant à bâtir pour le siècle qui vient, une « Europe européenne », renforçant dans les domaines essentiels les solidarités qui unissent, de fait, les grands pays européens. Une telle confédération, née du sentiment d’une solidarité de destin, reposerait sur des coopérations renforcées et peut impliquer des délégations de compétences pourvu qu’elles soient démocratiquement contrôlées. Cette voie est la seule qui permette de concilier l’idée européenne et le respect de la démocratie, à laquelle les peuples européens sont attachés. 

On ne peut donc substituer « l’intérêt européen » à l’intérêt national. L’intérêt de l’Humanité, d’un point de vue éthique, est d’ailleurs au-dessus de l’intérêt européen. La République a le souci des valeurs universelles, mais dans le respect des principes du droit international (souveraineté, liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes). L’intérêt européen se confond trop souvent avec la promotion des standards et des normes de l’économie ou de la démocratie libérales, au risque, parfois, de l’ingérence. L’intérêt national consiste donc en priorité, selon moi, à défendre et à fortifier la République dans le cadre d’un grand dessein européen (« l’Europe européenne ») et mondial (le développement et la paix). 

La globalisation libérale modifie la hiérarchie des puissances. La montée de la Chine et des émergents entraîne un déclin relatif des pays anciennement industrialisés. Mais ces mutations ne doivent pas conduire à restaurer des « blocs » : l’Occident d’un côté, les émergents de l’autre. L’Occident est pluriel et les émergents le sont aussi. La globalisation, fondée sur la croyance en l’efficience des marchés, conduit en fait au chaos. Pour le prévenir, elle suscite des formes nouvelles d’allégeance. De nouveaux « blocs » apparaissent dans la vie internationale (l’OTAN, les BRICS, etc.). Mais ces blocs sont largement artificiels. Ils coagulent toujours des nations : ce sont les nations qui restent les briques de base de l’ordre international. Le rôle de la France est de contribuer au dialogue des nations et des cultures parce qu’elle n’est pas un pays « occidental » comme un autre. Parce qu’elle a une vocation universaliste, elle ne peut réduire sa politique étrangère à un simple « occidentalisme ». L’indépendance doit rester le maître-mot de notre politique extérieure. Toute politique étrangère est porteuse d’une vision du monde. C’est cette « Weltanschaung » républicaine, au sens classique du terme, qui doit inspirer la politique étrangère de la France dans les temps difficiles qui sont devant nous. La République n’est pas un concept dépassé. Face aux intégrismes religieux, il y a un recours : c’est le patriotisme républicain. La République est, depuis deux siècles, le nom moderne de la France. Celle-ci plonge ses racines dans un passé plus ancien dont la République est l’héritière. Il n’y a donc pas lieu d’opposer la France et la République. Ceux qui pensent que la France a commencé en 1789 se trompent, comme se trompent ceux qui pensent qu’elle s’est arrêtée en 1789. Le patriotisme républicain englobe tout notre passé. C’est cet enracinement dans notre plus vieille histoire qui nous permettra de faire reculer l’hydre du terrorisme et de donner son plein sens à la laïcité : non pas un simple « édit de tolérance », mais une croyance profonde en la capacité des citoyens à trouver ensemble, par l’exercice de la Raison naturelle et dans une fraternité en action, la définition du bien commun. Le patriotisme républicain fait corps avec toute notre Histoire, comme l’ont toujours compris les grands fondateurs ou refondateurs de la République, de Ferry à De Gaulle, sans oublier Marc Bloch. C’est ce patriotisme républicain qui nous permettra de « faire France » à nouveau et de continuer notre Histoire. 

3. Comme le patriotisme républicain, le concept d’intérêt national (« Quel est l’intérêt du pays ? ») ne peut donc se comprendre pleinement qu’à la lumière des réalités qui ont façonné la France, celles de la géographie et celles de l’histoire longue. 

a) La France, c’est d’abord sa géographie particulière 
« Tout pays, disait Napoléon, a la politique de sa géographie ». La France est à la fois un cap et un isthme. 
- Elle est le cap du continent eurasiatique. Les migrations s’arrêtent à l’Océan. Son peuple est naturellement issu de mélanges. De cette situation de cap de l’Eurasie découlent deux tropismes : l’un continental, l’autre océanique et deux axes de politique étrangère : l’un tourné vers l’Europe, l’autre vers le grand large, c’est-à-dire vers le monde. 
- Mais la France est aussi un isthme entre la Manche et la Méditerranée : Elle est donc naturellement un trait d’union entre le Sud et le Nord de l’Europe. Il lui incombe donc de rendre vivable cette coexistence de deux Europe(s) très différentes. De son ouverture méditerranéenne découlent également deux politiques étrangères : l’une tournée vers l’Afrique, l’autre vers le Proche et le Moyen-Orient. 
- La géographie a également donné à la France une richesse agricole longtemps sans équivalent en Europe et par conséquent une démographie qui a été longtemps dominante et pourrait le redevenir au XXIe siècle, après un hiver démographique prolongé, de la fin du XVIIIe siècle à 1945. 

b) Plus encore que de la géographie, la France est le fruit de l’Histoire : elle est une création suprêmement politique : 

- La vocation à l’indépendance : 
La France n’est ni l’Allemagne ni l’Angleterre. Dès le Moyen-Age, elle s’est distinguée des deux autres principales puissances européennes avec lesquelles elle aurait pu se confondre : l’Allemagne (« le roi de France est empereur en son Royaume ») et l’Angleterre (Jeanne d’Arc, à la fin de la guerre de Cent Ans entend « bouter l’Anglais hors de France »). La France est ainsi indépendante par vocation. 

Elle a su, après Pavie (1525), desserrer l’étreinte de l’Empire de Charles Quint et établir pendant plus d’un siècle et demi (1648-1815) une hégémonie continentale. Mais elle a perdu à Trafalgar et Waterloo la guerre d’hégémonie maritime et mondiale qu’elle avait engagée avec l’Angleterre qui a su coaliser l’Europe contre la Révolution et l’Empire. Cette défaite manifeste le handicap qui résulte de notre double vocation maritime et continentale. Ce handicap est l’envers de nos atouts. 

- Mais la défaite militaire et politique de la France en 1815 a eu pour contrepartie une victoire intellectuelle et morale, celle des principes posés par la Révolution française. 
La Révolution française a dans l’Histoire de la France une centralité incontestable : proclamation des droits de l’Homme et du Citoyen, de la souveraineté nationale et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, affirmation de la laïcité dans l’espace public et du rôle de l’Ecole dans la formation du citoyen, construction d’un modèle républicain fondé sur le triptyque – liberté – égalité – fraternité – et doté d’une dynamique propre (la République, en 1945, s’est voulue « sociale ») recherche, en toutes circonstances, d’un intérêt général commun à tous les citoyens, idée du service public, définition de « biens communs ». 

- Ce modèle républicain français qui a besoin d’être constamment refondé s’est répandu largement et a influencé l’Europe (traité de Versailles) et le reste du monde à commencer, dès le XIXe siècle, par l’Amérique Latine. Les anciens Empires coloniaux et l’Empire soviétique ont accouché ensuite de jeunes nations, il est vrai aujourd’hui souvent encore fragiles. Mais il n’y a pas de raison de penser que le modèle républicain soit périmé. Simplement il lui faut du temps pour s’inscrire peu à peu dans l’Histoire. Il est frappant de voir que le modèle issu de la Révolution française a survécu à celui né de la Révolution de 1917, qui prétendait le dépasser. 

La France s’était créée, au XIXe siècle, en compensation de ses déboires continentaux (Waterloo et Sedan), un deuxième Empire colonial d’où procèdent aujourd’hui une vingtaine de nations indépendantes mais qui ont partagé un temps notre Histoire. Les deux guerres mondiales ont marqué la fin de l’hégémonie des nations européennes au profit des Etats-Unis mais aussi la victoire des idéaux démocratiques d’où ont découlé aussi la décolonisation et la généralisation au monde entier du modèle de l’Etat-nation. Dans ce bilan – provisoire – de l’Histoire, la France peut reconnaître la trace d’une influence dont elle n’a pas à rougir et dont les autres peuples n’ont pas perdu le souvenir. 

c) La France doit au général de Gaulle d’avoir, au XXe siècle, sauvegardé et modernisé le modèle républicain. 
Il a, de 1940 à 1945, maintenu la France parmi les démocraties combattantes et ainsi remise au rang des vainqueurs à l’issue d’une longue guerre de trente ans (1914-45). Il a donné à la Libération un contenu économique et social avancé au modèle républicain, à travers le programme du CNR. 
En 1958, les institutions de la Ve République ont fait du Président de la République « l’homme de la nation ». Le français, consacré comme langue de la République, est aussi aujourd’hui la langue de la francophonie (plus de 200 millions de locuteurs). La dissuasion nucléaire permet à la France d’assurer sa défense par elle-même, en dernier ressort. C’est le fondement ultime qui autorise l’exercice d’une politique étrangère indépendante. La France, enfin, est depuis 1945 l’un des cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies. A ce titre, elle se doit de respecter et de faire respecter la légalité internationale, à commencer par les principes qui fondent l’ordre international : souveraineté des Etats, autodétermination des peuples, non-ingérence, concept que vise à tempérer, depuis 2005, la notion de « responsabilité de protéger ». 

Si je rappelle ces principes, c’est qu’ils doivent être intégrés par nos décideurs, qui ont eu tendance à s’en écarter ces dernières années (Lybie, Syrie) au plus grand dommage non seulement des populations concernées et de la stabilité du monde mais aussi du rôle de médiation qui, dans un monde pluriel, devrait naturellement incomber à la France. 

4. On ne peut pas définir une politique étrangère sans une certaine projection vers ce que sera le XXIe siècle. 

a) La montée des pays dits émergents et d’abord de la Chine restera la tendance de fond, par-delà les phases de ralentissement voire de crise. La démographie, l’effet de rattrapage, la mondialisation même, y contribueront. Par temps de crise, ces pays sauront, grâce à l’effet de taille, se doter mieux que d’autres de plans nationaux de développement. 

b) Dans ces conditions, les Etats-Unis verront inéluctablement s’éroder leur poids relatif qui reste, aujourd’hui encore, dominant. Ils ont pu vérifier les limites du « hard power » et répugnent aux engagements au sol. Le Président Obama a entrepris une reconversion de leur politique extérieure, mais le « smart power » que les Etats-Unis exercent se fait autant au détriment de leurs alliés que de leurs adversaires : je veux notamment parler de l’extraterritorialité du droit américain qui pénalise gravement nos entreprises, non seulement par le fait des amendes colossales qui leur sont infligées que par l’effet de tétanisation exercé sur nos banques. Nous perdons ainsi des milliards de dollars dans notre commerce avec la Russie et avec l’Iran par l’effet d’une interprétation extensive des sanctions internationales et notamment américaines. Notre tradition d’indépendance nationale devrait nous conduire à suspendre la ratification du traité de libre-échange transatlantique tant qu’un accord ne sera pas intervenu pour mettre un terme à l’abus de position dominante manifeste que constitue l’extraterritorialité du droit américain. 

c) Notre politique étrangère s’est coulée depuis une douzaine d’années dans un « occidentalisme » à courte vue, comme s’il fallait resserrer les rangs derrière les Etats-Unis face à la montée des émergents (Chine, Russie, Iran, etc.). Si les Etats-Unis restent nos alliés de toujours et si notre alliance reste structurante pour le monde de demain, ils doivent aussi respecter nos intérêts. Ce n’est pas le cas dans nos rapports avec la Russie et l’Iran par exemple. Il ne faut donc pas confondre alliance et alignement. Avant de faire partie de la famille des nations occidentales, la France fait partie de la famille des nations humaines. Tout en restant fidèle à ses engagements vis-à-vis de ses alliés européens et occidentaux, la France doit développer ses relations avec les émergents lointains que sont la Chine, l’Inde, le Brésil, mais aussi les émergents plus proches que sont la Turquie et surtout l’Iran avec lequel il est temps de rebâtir une relations de long terme, et bien sûr le monde arabe, notre voisin immédiat : le Maghreb, l’Egypte, le Machreck et les pays du Golfe. 

d) L’indépendance de notre politique étrangère qui répond à la vocation de la France reste une posture adaptée au monde actuel. L’Occident est pluriel. La France y tient une place originale. Mais les émergents eux-mêmes sont pluriels. Nous ne sommes pas dans un match où des puissances anciennement colonisées ou dominées par l’Occident auraient résolu de concert de prendre une revanche historique sur une Europe qui les aurait jadis humiliées. Au contraire, beaucoup d’entre eux ont besoin que l’Europe s’affirme comme un acteur indépendant et non comme un « sous-ensemble » dominé par les Etats-Unis. Evitons les manichéismes. Nous ne sommes pas engagés dans une guerre de civilisations. Il appartient à la France de rompre les engrenages fatals dont se nourrissent l’islamisme radical d’un côté et le néoconservatisme occidentaliste de l’autre. 

e) Notre posture au XXIe siècle. 
- Il faut dépasser ces cycles de ressentiment et développer l’empathie à l’égard d’aires culturelles que nous devons connaître mieux. Le monde est pluriel et le maintien du rôle de la France implique que nous restions un passeur entre les cultures. 
- L’empathie à l’égard des autres ne signifie pas le déni de soi-même. Notre modèle républicain, souvent critiqué, est plus probablement en avance sur beaucoup d’autres, car la laïcité est une garantie de paix civile entre les citoyens et de concorde entre les religions. Nous n’avons pas à nous excuser d’être ce que nous sommes. Simplement devons-nous faire comprendre le modèle républicain sans agressivité, à la lumière de l’Histoire et des valeurs qu’il porte de liberté et de paix civile. 
- Notre politique étrangère doit rompre aussi bien avec un occidentalisme inféodé qu’avec une version pénitentielle de notre Histoire. Le récit national a ses ombres, mais il a aussi ses lumières : le pays qui a fait la Révolution française n’a pas à rougir de son Histoire et la France n’occupe pas la première place au podium des méfaits du colonialisme. Bref, dans nos rapports internationaux, nous devons assumer ce qui fait l’originalité et l’universalité de la France, dans l’esprit de ce que j’ai appelé, comme ministre de l’Education Nationale, « l’élitisme républicain », soucieux simultanément d’assurer l’égalité des chances entre les hommes et de reconnaître les mérites de chacun. La France, au XXIe siècle, doit continuer d’incarner à la fois la démocratie et l’excellence. Nous ne ferons pas, en effet, l’économie de l’effort et de l’innovation, dans une compétition mondiale exacerbée. 

II – La question de l’Europe est évidemment centrale dans la définition de notre politique étrangère. 

Il y a soixante-cinq ans qu’a été engagée, à l’initiative de la France par un geste généreux à l’égard de l’Allemagne, celui de Robert Schuman, en 1950, et celui du général de Gaulle, en 1962, la construction européenne : cela nous donne plus qu’un droit d’aînesse : une responsabilité particulière dans la refondation de l’Europe. Bien sûr notre économie a besoin d’être adossée à un marché puissant : l’Europe, au sens large, représente 70 % de nos exportations. Mais force est de reconnaître que l’Europe à vingt-huit n’est plus l’Europe à Six des commencements. 

Les élargissements successifs ont déporté vers l’Est le centre de gravité de la construction européenne. La construction communautaire, avec sa Commission à vingt-huit, est devenue impotente et inefficace et de surcroît illisible pour les peuples. J’observe simplement la montée en puissance dans les institutions européennes du Conseil européen, tout simplement parce que les chefs d’Etats et de gouvernement incarnent seuls une légitimité démocratique évidente. En effet, le Parlement européen « juxtapose la représentation de vingt-huit peuples », aux dires mêmes du Tribunal Constitutionnel de Karlsruhe, bref il n’est pas vraiment un Parlement, en l’absence d’un « demos européen ». La démocratie implique un sentiment d’appartenance qui rend acceptable la loi de la majorité par la minorité. Ce sentiment d’appartenance existe dans les nations. Au niveau européen il y a seulement le sentiment d’appartenir à une même famille de nations. Ainsi, nous rapprochons-nous du modèle gaulliste de « l’Europe des nations » : il faut pour cela outiller le Conseil européen et sans doute à terme revoir les traités pour enregistrer le déplacement vers le Conseil européen du centre de gravité des institutions européennes. 

Tout aussi importante est la question de nos relations avec la Russie. Dans l’Europe à vingt-huit, la relation avec la Russie est prise en otage par les pays de l’Union européenne qui sont ses voisins et qui relaient trop facilement un vieux rêve de la politique étrangère américaine consistant à enfoncer, à travers l’Ukraine, un coin entre l’Europe et la Russie. Ce dessein méconnaît une réalité profonde : la Russie est non seulement un pays européen mais un pays essentiel à l’Europe. Ce serait une hérésie de vouloir construire l’Europe contre la Russie. Celle-ci éprouve le sentiment de ne pas avoir été payée de retour, après la chute du communisme en 1989-91, à laquelle elle a contribué de manière décisive. Nous avons beaucoup d’intérêts communs, économiques et géopolitiques. Dans des régions comme le Caucase et l’Asie Centrale, nous n’avons pas intérêt à l’affaiblissement de la Russie. Celle-ci est un partenaire incontournable sur un grand nombre de dossiers. Elle est membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies. L’Europe ne pèsera pas au plan international, si elle n’établit pas de relations de confiance avec la Russie. 

Le « partenariat oriental », conçu en 2009, n’a pas tenu compte des intérêts de la Russie et a abouti à une crise ukrainienne qui était parfaitement évitable dans le cadre d’une vaste zone de libre échange, de l’Atlantique au Pacifique. L’enlisement du processus de Minsk, suite au refus de l’Ukraine d’appliquer le volet politique de l’accord et notamment d’adopter une révision constitutionnelle prévoyant la décentralisation du Donbass, risque de conduire à un nouveau conflit. Cette fixation sur l’Ukraine nous détourne des vraies menaces – le terrorisme djhihadiste – et des vrais défis - le non-développement et la crise migratoire. La levée des sanctions frappant la Russie devrait être à l’ordre du jour de la politique étrangère française. Pour peser dans le monde au XXIe siècle dominé par les Etats-Unis et la Chine, l’Europe et la Russie doivent redéfinir leur partenariat sur la base de leurs intérêts communs. Il faut donc travailler au rétablissement de relations confiantes et d’un équilibre stable de sécurité en Europe garanti par un nouveau traité incluant l’ensemble des pays européens et les Etats-Unis. C’est la seule voie raisonnable, si nous ne voulons pas recréer sur notre continent une nouvelle guerre froide, grosse de conflits politiques et militaires qui nous détourneraient de l’essentiel : la pacification durable du Moyen-Orient et une initiative majeure de co-développement avec l’Afrique. 

III – Le Proche et le Moyen-Orient constituent par excellence la région où la France peut jouer un rôle utile en exerçant une puissance de médiation. 

Entre Israël, la Palestine et le monde arabo-musulman, une occasion unique se présente encore de faire reconnaître à la fois un Etat palestinien dans ses frontières de 1967, et la garantie de la sécurité d’Israël, par la présence à ses frontières de contingents militaires des cinq pays membres permanents du CSNU. 

Un désordre sans précédent s’est installé au Moyen-Orient depuis un demi-siècle, du fait d’interventions extérieures déstabilisatrices (Irak, Lybie, Syrie) mais aussi de facteurs endogènes (échec des nationalismes arabes, montée de l’islamisme radical, absence de démocratie, impasse des « révolutions arabes », antagonismes politico-religieux, etc.). On ne remédiera pas à ce désordre sans revenir à quelques principes simples : 

1. Le soi-disant Etat-islamique est une menace pour le monde entier, et d’abord pour les pays musulmans. Son élimination rapide est une priorité. 
2. Plutôt qu’un remodelage du Moyen-Orient, gros de nouveaux conflits, il faut s’orienter vers la restauration de l’intégrité territoriale des Etats qui existent depuis un siècle (Irak, Syrie notamment), à condition qu’ils soient rendus vivables pour leurs populations : Irak fédéral, gouvernement représentatif à Damas. La crise syrienne n’est pas seulement une crise interne (« révolution arabe »). Elle est aussi depuis 2012 une guerre par procuration entre l’Arabie Séoudite, le Qatar et la Turquie d’une part et l’Iran d’autre part. Il est temps de le reconnaître. 
3. Le début de la restauration d’une gouvernance mondiale entre les Etats-Unis et la Russie, après l’accord du 14 juillet 2015 avec l’Iran, doit s’approfondir et recueillir le soutien de la France. Celle-ci doit jouer un rôle de pont et non de frein pour la normalisation des rapports intersyriens comme des relations entre l’Arabie Séoudite et l’Iran. L’alignement pur et simple sur l’Arabie Séoudite n’est pas une politique. Le gouvernement français doit concourir à la réussite de la Conférence de Genève sur la Syrie : un gouvernement d’union nationale doit pouvoir préparer des élections ouvertes à tous sous l’égide des Nations Unies. Il ne sert à rien de poser des conditions qui rendent tout progrès ultérieur impossible. La France ne peut jouer un rôle de médiation que si elle apparaît comme un pays indépendant et non aligné par avance sur les positions de tel ou tel protagoniste. 
4. Les quatre acteurs régionaux principaux : Turquie – Iran - Egypte – Arabie Séoudite doivent contribuer à éteindre les conflits en cours au Yémen et à réduire le terrorisme d’un soi-disant Etat islamique là où il se manifeste. 
5. De même faut-il associer l’Egypte et l’Algérie au règlement de l’affaire libyenne. Cela passe par la reconstitution d’un gouvernement libyen unique et la construction d’un Etat. 
6. Au total, la France, de concert avec les Etats-Unis et la Russie, doit faire prévaloir le principe de la stabilité des Etats non seulement en Irak et en Syrie mais aussi : 
- en Egypte 
- au Yémen par une reprise des relations entre l’Arabie Séoudite et l’Iran ; 
- en Turquie où le problème kurde doit être réglé « en interne » ; 
- en Lybie, enfin, où le soutien de l’Algérie est crucial. 


IV – De même en Afrique, la stabilité des pays du Sahel implique que soient reconstituées (ou constituées) dans chaque pays des forces régaliennes (armée-police) sans lesquelles il n’y aura pas de sécurité ni par conséquent de développement. Les déséquilibres démographiques faciles à anticiper sont colossaux. Ils commandent une initiative européenne, voire mondiale, de grande ampleur pour aider les Etats africains et notamment ceux du Sahel à se mettre sur pied et à engager un immense effort de développement en matière d’agriculture, d’eau, d’électricité, d’infrastructures de transports et de télécommunications, d’éducation à la santé et à la maîtrise de la démographie, d’enseignement enfin. La francophonie doit comporter en priorité un projet de formation des enseignants. Elle a besoin d’être repensée (ou même simplement pensée). Or, le projet francophone aujourd’hui n’est pas porté par l’Etat français. Il a été délégué à des Agences qui ne disposent que de moyens médiocres en dehors de la bonne volonté de ceux qui les animent. Il y a une contradiction manifeste entre le discours sur la francophonie et la réalité de l’action publique. Ce problème doit être traité au plus haut niveau. L’Afrique doit aussi se développer au plan industriel, en visant d’abord à satisfaire ses besoins de base : industries agroalimentaires, textiles, habillement, chaussures, etc. Il n’y a aucune raison pour que ne s’y développent pas par ailleurs, dans ces secteurs ou dans d’autres, des unités de production compétitives à l’échelle mondiale. 

Il faudra favoriser les investissements croisés entre notamment l’Europe, le Maghreb et les Etats du Sahel de façon à stabiliser cette région fragile qui pourrait, en l’absence d’une telle initiative, devenir une véritable « mine » pour toute l’Afrique et pour l’Europe, à l’horizon d’une quinzaine d’années. 

Le reste de l’Afrique a davantage de ressources et d’atouts, mais les Etats aussi y sont fragiles. La France a une responsabilité particulière parce qu’elle connaît l’Afrique et parce que celle-ci est partiellement francophone mais ses moyens ne lui permettront pas de faire face, si elle ne suscite pas une initiative européenne « Afrique », de grande ampleur. Il est vain de croire que la force Barkhane pourra assurer longtemps la sécurité des pays du Sahel et plus généralement des pays africains. C’est à eux qu’il revient de prendre rapidement la relève, à peine de graves mécomptes dans un avenir proche. 

V – Asie et Amérique Latine 

Si elle veut rester une puissance mondiale, la France ne peut être absente de l’Asie. C’est le continent de l’avenir mais c’est là aussi que résident les plus graves menaces pour la paix du monde. La France doit s’investir en Asie et d’abord à travers l’apprentissage des langues par ses nationaux : chinois en premier lieu mais aussi japonais, coréen, hindi, ourdou, vietnamien, bahasa indonesia. La France doit avoir une politique à long terme avec la Chine, l’Inde, le Japon. Politique de paix et d’équilibre mais aussi volonté de tisser des liens privilégiés entre notamment la Chine et l’Europe. En effet, la Chine a besoin d’un interlocuteur politique en Europe et la France comme l’Europe ont besoin de pouvoir dialoguer avec la Chine pour ne pas se laisser enfermer dans les pinces du G2. 

De même, l’Amérique Latine à laquelle nous relient de profondes affinités culturelles a besoin d’une Europe indépendante des Etats-Unis. La latinité doit être une composante de notre politique étrangère … Une France indépendante retrouverait en Amérique Latine le prestige qu’elle a laissé s’éroder. 

VI – Europe européenne et choix du monde 

1. Au total la France ne doit pas renoncer au choix européen mais en revoir les modalités pour construire une « Europe européenne » capable d’exister par elle-même et pour elle-même, bref d’être un acteur à part entière de la politique mondiale. Un tel choix implique le resserrement des solidarités entre les grands Etats européens, au plan économique, industriel, technologique mais aussi en politique extérieure pour faire face aux défis que constituent l’abus de leur position dominante par les Etats-Unis, le rachat éventuel de nos entreprises stratégiques par l’une ou l’autre des Superpuissances de demain, et enfin les menaces de déstabilisation venues du Sud : terrorisme, immigration non contrôlée. L’accueil durable sur notre sol doit être proportionné à la capacité d’intégration du pays. Pour continuer à « faire France » à nouveau, il faut que le pays ait envie de faire d’étrangers des Français et prenne les moyens d’une véritable politique d’intégration. Il faut aussi que les nouveaux citoyens aient envie de s’intégrer à la France. C’est l’image que donne la France, à elle-même et aux autres, qu’il faut relever. Dans ces conditions, l’immigration pourra être un atout pour la France. 

2. La construction d’une « Europe européenne » est un projet de longue haleine. Elle ne dispense nullement la France de faire le choix du monde, bien au contraire. Les grandes entreprises multinationales françaises sont les vecteurs privilégiés de cette ouverture mais y contribuent aussi nos 125 000 entreprises exportatrices encore trop peu nombreuses par rapport aux 350 000 allemandes ainsi que nos 2,5 millions de concitoyens vivant à l’étranger. Le réseau de nos établissements d’enseignement joue également un rôle majeur. Enfin, les DOM-TOM doivent davantage contribuer au rayonnement de la France dans leur espace géographique. 

VII – La contradiction majeure : entre les outils et les moyens de la puissance. 

La France pourra-t-elle maintenir un réseau diplomatique qui est le deuxième mondial, une dissuasion nucléaire crédible, une capacité de « projection de forces » significative, tout en veillant à la protection de son territoire et de sa population, si elle ne sort pas de la stagnation dans laquelle elle semble s’être enfermée depuis près de dix ans ? 

Notre compétitivité stagne ou s’érode si on la mesure par le déficit de nos échanges de produits manufacturés (hors énergie et matériels de défense) : 23 Milliards en 2015 contre 13,7 en 2008 et par la faible progression de nos exportations globales (455 Milliards en 2015 contre 417,6 Milliards en 2008). Notre tissu industriel s’effiloche. Nos grands groupes passent sous pavillon étranger (Arcelor, Pechiney, Alcatel, Alstom, Lafarge). Rien de tout cela n’était inévitable. 

Dans le système de la monnaie unique, nous ne pouvons plus dévaluer. Nous avons laissé se creuser l’écart avec nos compétiteurs européens : écart des coûts, salariaux et généraux d’abord, mais aussi de la compétitivité par l’innovation, du fait de la réduction des marges des entreprises qui n’investissent pas assez, notamment dans la recherche. Nous enregistrons ainsi un déficit avec tous les pays de la zone euro. Soit on change ce système (monnaie commune par exemple), soit on opère les fameuses « réformes » que tous les gouvernements appellent de leurs vœux sans que le contenu en soit jamais précisément défini. J’ai cru comprendre qu’il s’agissait principalement du temps de travail, du coût du travail à travers les heures supplémentaires et de la durée de l’indemnisation du chômage. J’observe que ces réformes doivent être politiquement soutenables. Si elles intervenaient, elles ne le feraient pas dans le même contexte économique porteur que les réformes Schröder de 2004. Le chemin de la dévaluation compétitive, s’il est suivi par tous, nourrit la récession. C’est bien le reproche qui est fait à la monnaie unique dans tous les pays du Sud de l’Europe. Globalement d’ailleurs, le taux de croissance dans la zone euro est inférieur de moitié à celui des Etats-Unis et inférieur à celui de nombreux pays européens situés en dehors (Grande-Bretagne, Suède, Pologne, etc.) sans parler de la Chine et de l’Inde qui caracolent entre 6,5 et 7,5 %. 

Le peuple français peut-il être convaincu de la nécessité de l’effort ? Nous ne travaillons pas assez. Mais la répartition et la rémunération de l’effort comptent aussi parce que la demande est le moteur de la croissance. Naturellement la politique salariale devrait être définie à l’échelle européenne. J’entends que la compétitivité par les coûts passe aussi par des économies. Certaines ont été effectuées. D’autres sont certainement possibles … Mais j’observe que les réformes autour desquelles on fait grand tapage – la réforme territoriale par exemple – ne rapportent en fait aucune économie mais constitueront au contraire un facteur de dispersion et de désorganisation des Administrations régionalisées de l’Etat. 

Le modèle mercantiliste allemand (excédent commercial de 8,5 points du PIB) doit tenir compte des responsabilités qui incombent à l’Allemagne en Europe. Un modèle de développement plus tourné vers le marché intérieur permettrait de nourrir une croissance européenne plus forte. 

Que faire ? La compétitivité par l’innovation est préférable à la compétitivité par les salaires. Mais le niveau de l’investissement en France ne permet pas de nourrir assez les innovations. Nous voilà « au rouet », ramenés au casse-tête des parités internes à l’euro. Il serait souhaitable de combler les écarts qui se sont creusés depuis 1999 entre grands pays industriels européens. Pouvons-nous convaincre nos amis allemands de mener en Europe une stratégie plus coopérative ? S’ils veulent que la France puisse jouer, à leurs côtés, son rôle d’équilibre et de proposition en Europe, ils le comprendront, dans leur intérêt même. Mais s’ils restent indifférents à la strangulation ottomane dont souffre, pour des raisons historiques et structurelles anciennes, l’économie française par rapport à la leur, en régime de change bloqué, il appartiendra à un gouvernement français désireux de prévenir une dérive extrémiste, de prendre les mesures que commande le salut public, et cela dans l’intérêt de l’Europe tout entière. Le temps des choix difficiles est devant nous. Les marges sont étroites. Seul y réussira un gouvernement de large rassemblement qui devra inventer une politique assez nouvelle et ambitieuse pour qu’elle puisse susciter l’adhésion populaire. 

Le peuple français est ainsi placé en face de choix décisifs : Quel est aujourd’hui l’intérêt du pays ? Voulons-nous que la France reste une grande nation et sommes-nous prêts à en prendre les moyens ou acceptons-nous l’effacement de la France ? Un regain de patriotisme s’observe dans notre peuple depuis les attentats de 2015. Mais il faut que ce patriotisme inspire l’action collective et que les élites elles-mêmes en donnent l’exemple, notamment à la tête de nos grandes entreprises par les choix de localisation, la politique des rémunérations ou par le comportement quotidien (refus de l’évasion fiscale et de la débine permanente de la France). Si une rupture s’opère dans l’attitude des élites, je suis convaincu que le peuple, dans sa masse, acceptera de relever le défi de l’effort. Là est la clé. La France, comme elle a su le faire à plusieurs reprises dans son Histoire, a besoin de prendre un nouveau départ. Sinon, de crise en crise, ce serait l’effacement et la fin de la France. Qui se résignerait d’un cœur léger, à la disparition de ce qui fut une très grande chose ? Pour ma part, je garde confiance : les secousses prévisibles à l’horizon favoriseront ce nouveau départ, si une élite, dès aujourd’hui, se dégage pour le préparer. 

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1. Couve de Murville, Une politique étrangère, 1958-1969, p. 15, Plon 1971. 
2. Clause qui interdit le renflouement des Etats. 

SOURCE:

http://www.chevenement.fr/Politique-etrangere-et-interet-national_a1815.html

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